Vous n’êtes pas sans savoir que les Coréens sont très à cheval sur le respect des règles. Mais vous êtes-vous déjà demandés pourquoi ? Je ne vais pas pouvoir vous apporter une réponse concrète aujourd’hui mais plutôt une piste de réflexion avec la dénonciation. Chez nous, dénoncer son voisin est plutôt mal vu, mais en Corée c’est monnaie courante ! Du petit délit à la grosse escroquerie, la dénonciation peut rapporter beaucoup d’argent.
Dénoncer… mais pourquoi ?
Comme je l’ai dit en introduction, en France, dénoncer quelqu’un n’est pas joli joli. Mais la Corée est un tout autre pays, ayant une tout autre culture et des pratiques différentes qu’il est bon de connaître. Là-bas, la dénonciation est récompensée par l’État qui verse 20% du montant de l’amende perçue au dénonciateur. Les origines de la pratique remontent à la Guerre de Corée, lorsque le gouvernement versait des primes aux citoyens dénonçant les ennemis infiltrés. Il existerait près de 336 infractions qui permettent de décrocher une récompense si vous avez les preuves nécessaires (la valeur variant en fonction de la gravité de l’infraction).
Le gouvernement a décidé de faire perdurer cette pratique et de récompenser les dénonciateurs à cause, notamment, du manque d’effectif policier et de la volonté de faire respecter les règles de vie en citoyenneté. Et cela fonctionne plutôt bien. Si vous apportez aux policiers un cliché d’une personne jetant un mégot de cigarette par terre, vous pourrez empocher jusqu’à 30 000 wons, soit environ 20 euros. Mais les récompenses peuvent monter très haut si une personne dénonce des pratiques frauduleuses comme l’exercice d’une profession sans diplôme, la fraude à l’assurance maladie ou fiscale, le trafic de stupéfiants ou encore les affaires de corruption. Des civils sont donc devenus de vrais paparazzis-inspecteurs des fraudes en tout genre ; une école privée, spécialisée dans la dénonciation, a même ouvert ses portes…
Une école pour former les dénonciateurs
Oui, ça existe ! Elles proposent des formations sur deux ans afin de devenir le parfait paparazzis prêt à traquer la moindre infraction. Pour environ 200 euros, les élèves apprennent à manier les caméras cachées et les enregistreurs camouflés. Mais il doivent également passer en revue les nouvelles législations et faire une piqûre de rappel sur les anciennes. Il existerait aujourd’hui plusieurs dizaines d’écoles de ce type dans tout le pays.
Ces écoles accueillent des centaines de nouveaux élèves à chaque session. Pour eux, cela permet de gagner un peu d’argent et de rendre service au pays. On y trouve des retraités, des hommes, des femmes, des personnes au chômage et même des jeunes actifs. Certains rêvent même de devenir « délateur professionnel ». Cette pratique, plus que courante, soulève cependant plusieurs questions.
Une pratique controversée
Cette pratique se veut dans un premier temps civique. Cependant, d’après divers témoignages, on se rend vite compte que l’appât du gain y est aussi pour quelque chose. Finalement, ces dénonciateurs ne sont pas si bien vus que cela, rappelant le système nord-coréen basé sur la délation. Certains vont même jusqu’à le cacher à leur famille alors que d’autres n’ont pas hésité à dénoncer leurs proches pour s’assurer une prime et ainsi rembourser leurs dettes. Oh Chang Soo, professeur de droit à l’université de Jeju, s’inquiète de ces pratiques. Il pense en effet que cela ne fait qu’augmenter la méfiance entre les membres d’une même société. Mais les dénonciateurs se considèrent plutôt comme des justiciers, allant là où la police ne va pas pour dénoncer les mauvaises pratiques.
La dénonciation attire beaucoup les femmes au foyer, les personnes au chômage ou les retraités qui n’ont qu’une maigre pension pour vivre. Pour certains, cela leur permet de finir le mois alors que d’autres ont fait fortune. Mais la dénonciation n’est cependant pas sans risque. En effet, certains « justiciers » décident de s’en prendre seuls aux trafiquants de drogue, aux proxénètes ou encore aux gangs. Et il est évident que les conséquences peuvent se révéler terribles. Cela pose la question des limites de la pratique, à savoir quand passer le relais aux autorités compétentes.
Quoi qu’il en soit, que l’on soit pour ou contre cette pratique, nous ne sommes pas là pour juger mais pour informer ! La dénonciation est monnaie courante en Corée et il n’est pas rare de croiser des panneaux l’encourageant, notamment à côté des bacs de tri des ordures.
Sources : Le Figaro| France Info| RTBF| RFI