Page 1 : la Gay Pride à Séoul et le festival du film gay de Corée
Page 2 : l’homosexualité au pays du Matin calme
Pour mieux appréhender l’importance de cette parade et ce festival, un point sur la situation des homosexuels dans la société coréenne est nécessaire.
Que dit le droit ?
L’article 31 du Code pénal civil dispose qu’« aucune personne ne doit être victime de discrimination fondée sur son orientation sexuelle. »
À l’âge de 20 ans, les personnes transgenres sont autorisées à effectuer une opération de réaffectation sexuelle en Corée. Par la suite, elles peuvent modifier les informations sur leur genre sur les documents officiels.
Harisu est le premier animateur transgenre en Corée du Sud. Le 22 juin 2006, la Cour suprême a statué que les personnes transgenres qui avaient subi une opération de réaffectation sexuelle avaient le droit de changer leur genre dans tous les documents juridiques. Cela inclut le droit de demander une correction de leur sexe dans tous les dossiers publics et gouvernementaux, comme le registre des recensements.
Le cas particulier de l’armée
Malheureusement le service militaire en Corée n’évolue pas au même rythme que la société. En effet l’article 92 du Code pénal militaire, qui fait actuellement l’objet d’une contestation judiciaire, fait ressortir les relations sexuelles entre des membres du même sexe comme du « harcèlement sexuel », punissable d’un maximum d’un an de prison. Mais un tribunal militaire a statué en 2010 que cette loi était illégale, en disant que l’homosexualité est une question strictement personnelle. Cette décision a fait l’objet d’un appel devant la Cour constitutionnelle de la Corée du Sud. Celle-ci n’a pas encore pris de décision.
Comme vous le savez sûrement, le service militaire est obligatoire pour tout citoyen masculin en Corée du Sud, pendant deux ans. Or les « tests de psychologie » au moment de l’enrôlement comprennent plusieurs questions concernant les préférences sexuelles. Ainsi, les militaires homosexuels en service actif sont classés comme ayant un « trouble de la personnalité » ou un « handicap de comportement ». Ces derniers peuvent être institutionnalisés ou déconseillés. La question a fait l’objet d’un appel devant la Cour constitutionnelle coréenne.
Évolution, notamment dans les médias
Le premier magazine homosexuel de Corée, Buddy, a été lancé en 1998. Depuis, plusieurs publicités populaires à thème gay ont également été diffusées.
Afin de changer la conscience générale sur l’homosexualité, plusieurs dramas et films traitant du sujet sont sortis comme par exemple :
- The King and the Clown (2005) : le film est devenu le plus gros succès dans l’histoire du film coréen et raconte l’histoire d’un roi et de son bouffon.
- A Frozen Flower (2008) : il relate l’histoire d’amour d’un roi avec un autre homme.
Dès 2010, les dramas ont commencé à présenter des personnages et des thèmes homosexuels :
- Life Is Beautiful (SBS TV) : Il s’agit du premier drame en prime time à explorer les relations d’un couple masculin gay.
- Personal Taste (MBC) : il raconte l’histoire d’un homme qui prétend être gay pour devenir colocataire avec une femme.
- The Daughters of Bilitis (KBS) : sur la vie des femmes lesbiennes. Immédiatement après sa diffusion, les netizens indignés ont menacé de boycotter la chaîne. L’équipe de production a finalement stoppé la diffusion quatre jours après la diffusion du pilote.
L’acteur Hong Seok Cheon, après avoir fait son coming out en 2000, a été renvoyé de son emploi. Depuis, il est apparu dans plusieurs programmes de débat pour l’appui des droits des homosexuels.
L’acteur populaire Kim Ji Hoo, qui était ouvertement gay, s’est pendu le 8 octobre 2008. La police a attribué son suicide aux préjugés publics contre l’homosexualité.
En 2013, le réalisateur Kim Jho Kwang Soo et son partenaire Kim Seung Hwan sont devenus le premier couple gay sud-coréen à se marier publiquement. Cependant, il ne s’agit pas d’un mariage légalement reconnu.
Dans la vie de tous les jours
Le mot coréen pour « homosexuel » est dongseongaeja (동성애자, « amoureux du même sexe »). Cependant, les homosexuels sud-coréens utilisent fréquemment le terme ibanin (이반 인) qui peut être traduit par « personne de type différent » et qui est généralement raccourci en iban (이반). Le mot est un jeu direct sur le terme ilbanin (일반인) signifiant « personne normale » ou « personne ordinaire ». En outre, les mots-prêts anglais sont utilisés en Corée du Sud pour décrire les personnes LGBTI Ce sont des translittérations simples de mots anglais en Hangeul : lesbian est lejeubieon (레즈비언), gay est gei (게이), queer est kuieo (퀴어) et transgender teuraenseujendeo (트랜스젠더).
L’homosexualité reste largement taboue dans la société sud-coréenne. Ce manque de visibilité se reflète par l’absence d’établissements. Les quelques clubs homosexuels en Corée du Sud sont surtout présents dans le secteur étranger Itaewon. Ils sont en particulier dans la section connue sous le nom de « Homo-hill ». Cependant, Jong-no est depuis longtemps connu pour répondre à la clientèle non occidentale homosexuelle.
Une récente étude de 2017 démontre la croissance d’une communauté de « style de vie gay » dans Jong-no où les individus LGBTI se sentent en sécurité. Bien que l’étude ne porte que sur un café bien connu, le célèbre Bean Gay, il existe de nombreux autres endroits dans le quartier de Jong.
Au cours des dernières années, la combinaison du tabou et du capitalisme des consommateurs du quartier d’Itaewon a poussé une nouvelle commercialisation gay à l’extérieur d’Itaewon, tout en isolant les lieux restants.
Comme vous pouvez le constater, participer à la Gay Pride ou/et assister au festival du film gay sont un véritable acte politique en Corée du Sud envers une minorité encore discriminée devant se battre sans cesse pour ses droits partiellement acquis.
Sources : Le Monde | Korea Queer Culture Festival | Indiegogo | Firstpost | The Korea Times