« Tout a commencé lors d’une froide journée de novembre ». Bien que ce début de phrase fasse penser à un conte de votre enfance, cette histoire n’a rien de féerique. En effet, comment passer à côté de ce scandale qui a chamboulé toute la Corée ? À moins que vous ne viviez dans une grotte avec vos amis les animaux de la forêt, vous avez dû avoir vent de cette histoire. Retour sur un scandale sans précédent depuis celui du Watergate.
Influence et corruption
Revenons à la base du scandale. Début novembre, la Corée du Sud apprend l’existence d’une mystérieuse confidente de la présidente Park. Il s’agit de Choi Soon Sil, fille de gourou, femme d’affaires et se vantant d’avoir des pouvoirs chamaniques. L’amitié des deux femmes remonterait aux années 70. C’est après l’assassinat de sa mère que la présidente Park se rapproche de l’Église de la vie éternelle dirigée par Choi Tae Min qui n’est autre que le père de Choi Soon Sil. Ce serait à ce moment-là que le « contrôle » de la présidente Park aurait débuté.
L’amitié entre les deux femmes perdure et, grâce à ses pouvoirs, Choi Soon Sil aurait prédit l’avenir et par ce biais influencé la politique sud-coréenne. En effet, la chamane aurait prédit la chute de la Corée du Nord, ce qui aurait eu comme conséquence, entre autres, la fermeture du parc industriel de Kaesung, un des rares liens unissant encore le Nord au Sud. Outre cette influence sur fond de magie noire, la présidente aurait transmis à Choi Soon Sil des documents confidentiels sur la question de la Corée du Nord.
En plus de ces affaires de trafic d’influence, les deux femmes croulent également sous les accusations de corruption. Choi Soon Sil aurait largement profité de son amitié avec la présidente pour s’enrichir personnellement, elle est soupçonnée d’avoir reçu des milliers d’euros de la part de puissantes entreprises coréennes. Deux fondations de Choi auraient reçu 61 millions d’euros (77,4 milliards de wons) par les « chaebols » (groupe d’entreprises). D’après Yonhap, une agence sud-coréenne, Samsung et Hyundai seraient d’ailleurs impliquées.
La chute de Park Geun Hye
Suite à ces accusations, la présidente Park Geun Hye s’est exprimée devant les caméras pour s’excuser, pensant apaiser la colère du peuple coréen. Elle n’a pas nié avoir consulté Choi sur certains dossiers. Larmoyante, elle affirme avoir été soutenue par son amie pendant les moments difficiles. Elle se livre et avoue avoir « baissé la garde » face à cette amie : « J’avais confiance mais j’ai été négligente, pas assez dure envers mes connaissances ». Ses excuses publiques ne calment pas les Sud-Coréens et début novembre elle désigne un nouveau premier ministre, Kim Byong Joon, afin d’apaiser la situation, en vain.
Toujours début novembre, Choi Soon Sil est placée en détention par le Parquet. À la suite de cet événement, c’est au tour de la présidente Park d’être interrogée par le Parquet. Elle y est reconnue complice de Choi dans ses histoires de manipulation et de corruption. C’est à partir de ce moment qu’on commence à entendre parler au sein du gouvernement d’une éventuelle destitution de la présidente. Park se dit alors prête à recevoir sa « peine », à quitter le gouvernement. Ce n’est que récemment, le 9 décembre dernier, que l’Assemblée nationale vote sa destitution avec 234 voix pour, 56 contre, 2 abstentions et 7 votes non validés. Dans l’attente de la décision finale par la Cour constitutionnelle, Park Geun Hye est suspendue de ses fonctions de présidente.
Une mobilisation sans précédent
Ce scandale a provoqué la colère des Sud-Coréens. D’importantes manifestations ont eu lieu à travers tout le pays. La Corée n’avait pas connu une telle mobilisation depuis celle des années 80 par les pro-démocrates. Les principaux rassemblements ont eu lieu à Séoul, non loin de la Maison Bleue – équivalent coréen de la Maison Blanche. Des rassemblements se sont également produits en province, mais c’est les images de Séoul qui ont frappé le monde entier ! Étudiants, hommes d’affaires, mères de famille, moines, retraités… Tous étaient unis. Près d’un demi-million de personnes scandant le même message « Park dégage ! » ça impressionne. Malgré la foule, aucun débordement n’a été reporté. Les images parlant plus que les mots, jetez un œil à la vidéo si vous avez raté ces images !
Le weekend dernier, après l’annonce de la destitution de la présidente, un nouveau rassemblement a eu lieu. Les Sud-Coréens se sont rassemblés, non pas pour protester, mais pour célébrer leur victoire sur la présidente ! Certes cette mobilisation était moins importante, mais près de 200 000 personnes se sont réunies pour fêter la chute de Park sur le boulevard de Gwanghwamun. L’ambiance y était festive, des chants, des danses et des tambours, la Corée ne fait définitivement jamais les choses à moitié ! Affaire à suivre tout de même, qui sera le prochain président de la Corée ? L’avenir nous le dira.
Sources : KBS World, Yonhap News, Le Figaro, Le Monde, France Info