Rendu célèbre pour sa statue Fille de la Paix (평화의 소녀상), le couple de sculpteurs sud-coréens Kim Seo Kyung et Kim Eun Sung se distingue pour son engagement très fort envers la reconnaissance des crimes de guerre liés à la Corée. Les hiboux de KoreasOwls vous proposent de découvrir ces artistes qui œuvrent pour la paix.
Kim Seo Kyung et Kim Eun Sung, un couple lié par l’art
Kim Seo Kyung (김서경) et Kim Eun Sung (김운성) sont deux artistes sud-coréens qui ont fait de leur art un engagement social. Participant aux mouvements pour la démocratie pendant les années 1980, le couple n’a jamais quitté cette implication politique. Elle imprègne désormais leurs œuvres. Les deux artistes ont aussi ouvert un institut d’art qu’ils ont géré pendant trois ans avant de le fermer. Les œuvres de Kim Seo Kyung étaient alors assez populaires, mais les deux artistes souhaitaient travailler sur d’autres projets.
Son mari utilise beaucoup de méthodes métaphoriques, alors qu’elle préfère utiliser davantage d’expressions simples. « Si je m’intéresse aux gens et exprime l’expression et la vie d’une personne, mon mari fait le travail pour y penser une fois » explique-t-elle. Kim Eun Sung estime que le thème de la paix et des droits de l’homme devrait continuer à être au centre de l’art. Il souhaite continuer à faire des travaux intéressants et beaux tout en commémorant la Paix et l’Unification.
KoreasOwls vous propose de découvrir deux de leurs œuvres.
Fille de la Paix, une œuvre pour la reconnaissance des filles de réconfort
Kim Seo Kyung et Kim Eun Sung ont commencé à travailler sur cette sculpture après une rencontre avec des femmes de réconfort. Troublés, ils ont proposé leurs services au Comité. Le 14 décembre 2011, la sculpture est installée devant l’ambassade du Japon à Séoul. Les tensions diplomatiques qui en découlèrent rendirent d’autant plus visible ce point important de l’histoire qui avait été omis. Depuis, la sculpture a été installée dans 20 autres lieux et déclinées en de nombreuses versions.
À l’origine, la sculpture représente une jeune fille entre 13 et 15 ans, le regard droit et les poings serrés. Un oiseau se dresse sur son épaule, symbole de paix et de rassemblement. Son ombre forme la silhouette d’une vieille dame en mémoire à toutes les femmes aujourd’hui âgées qui ont gardé le secret pendant des décennies. Une chaise vide évoque les disparues et invite les passants à s’asseoir aux côtés de la Fille de la Paix.
Une trésor de mémoire pour les coréens
Devenue un symbole brûlant de la reconnaissance des crimes commis par l’armée japonaise à l’encontre de la Corée, la Fille de la Paix est largement portée dans le cœur des Coréens. Aussi, de nombreux passants s’arrêtent, lui offrent un bonnet ou une écharpe en hiver. D’autres la couvrent de fleurs quand vient le printemps. Son installation coïncide aussi avec le déliement des langues sur de nombreux sujets sensibles. Le drame du ferry Sewol, le scandale de l’affaire des manuels d’états ont fini par eux aussi graviter autour de la statue. Elle est, alors, devenue un objet urbain qui centralise les sentiments de colère et d’espoir des coréens.
« Les gens voient davantage la sculpture comme un être humain plutôt que comme une œuvre d’art. » raconte Kim Seo Kyung. « Le fait que des personnes ajoutent un bonnet ou une écharpe, des lettres, des poèmes ou des paquets de chaleur à la statue, signifie que les gens ont commencé à y ajouter leurs propres significations et l’utilisent comme moyen d’exprimer leurs pensées sur les problèmes liés aux abus à l’encontre des femmes. Tout comme nous l’avons fait pour exprimer notre colère et le souhait de ne jamais répéter une histoire si douloureuse. »
VietNam Pieta, une œuvre pour la reconnaissance des crimes de guerre durant la Guerre du Vietnam
L’engagement de Kim Seo Kyung et Kim Eun Sung ne s’arrête pas qu’à la Corée. En 2014, ils ont décidé d’attaquer la mémoire de la guerre du Vietnam et des crimes de guerre perpétués par l’armée sud-coréenne. Ils ont en effet réalisé une sculpture intitulée Vietnam Pieta (베트남 피에타) par laquelle ils souhaitent que des excuses publiques de la Corée envers le Vietnam soient faites. Kim Seo Kyung parle en ces termes au sujet de cette œuvre : « Nous voulions mettre en lumière l’histoire coréenne comme oppresseurs et non seulement comme victimes. »
Depuis, la sculpture a été présentée aux côtés de son aînée pour sensibiliser les Coréens à cette partie méconnue de leur histoire. Une version réduite a aussi été fabriquée et installée dans la ville de Gangjeong sur l’île de Jeju. Trouver le lieu où la statue sera érigée n’est pas facile car cela soulève des questions diplomatiques sensibles. En attendant de décider où la version finale sera installée, les deux artistes ont entrepris plusieurs voyages au Vietnam pour rencontrer les victimes.
Il y ont appris que de nombreux nourrissons étaient morts avant d’avoir atteint l’âge d’un an. C’est la raison pour laquelle ils ont souhaité travailler sur une représentation de la Pieta. Une mère enlace son enfant, se fondant dans un socle aux allures de forêt luxuriante. La mère console son enfant représentant les victimes civiles. Mais la statue symbolise aussi la Mère Nature ravagée par la guerre. Si le devenir de cette œuvre est encore incertaine, l’engagement juste et créatif de Kim Seo Kyung et Kim Eun Sung révèle un scène artistique coréenne qu’on aimerait découvrir davantage en France.
Sources : arirangTV | Koreaexposé | Mengnews |Journal Kyong Hyang
Article rédigé par Casado Hélène.