Page 1: Informations générales
Page 2: Parasite, un drame social
Page 3: Famille, Réalisation, interprétation et conclusion
Parasite, un film de famille
Les films de famille ne manquent pas. On peut en citer plein et de plein de genres différents. Certains tournant les relations familiales en dérision, certains montrant la complexité de tous les liens au sein d’une famille. Parasite cherche à montrer cette complexité mais aussi à montrer la beauté des familles. Quelles soient pauvres ou riches, ce film s’attache à montrer la force de ces liens, et la façon dont ils se reconstruisent une fois brisés. Encore une fois, on a un jeu d’opposition. Les relations entre la famille de Ki Woo et la famille Park ne sont pas les mêmes et n’évoluent pas de la même façon. D’un côté, on a une famille qui se soutient, qui vit le même calvaire et qui décide de l’affronter tous ensemble. C’est cette beauté-là que Bong Joon Ho montre. La famille de Ki Woo a beau vivre dans un univers insalubre, leur famille est forte et soudée. Et c’est ce que j’ai particulièrement apprécié dans ce film, qu’on puisse montrer de cette façon et sans clichés, les relations entre les membres d’une famille.

À l’opposé, la famille Park semble un peu plus froide. Chaque membre distant l’un de l’autre. Mais Parasite ne se contente pas de cet état de fait de la famille riche, froide dont les membres ne sont que courtois les uns envers les autres. Il montre également comment une famille comme celle-là peut se reconstruire. Et le tout se mêle avec l’histoire et la dimension sociale du film avec notamment l’effet différent que peut avoir l’argent sur les gens. Sans se remettre en question, nous voyons des évolutions très intéressantes dans les personnages, ce qui fait que nous ne nous lassons presque jamais. Parasite est donc un film de famille, pas comme nous l’entendons habituellement, mais qui, encore une fois, nous laisse une large base de réflexion une fois le film fini.
Parasite, la réalisation au service du récit
Pour parler de Parasite correctement, il faut parler de la réalisation et de son esthétisme. J’ai déjà commencé à parler des couleurs et des environnements, mais il faut souligner à quel point Bong Joon Ho arrive à non seulement parler de rapports de forces sociaux, mais aussi à quel point il arrive à nous les montrer. Que ce soit par le jeu d’acteur, mais aussi par différentes symboliques qui viennent nous apporter plus de détails sur l’histoire et sur les messages du film.
Montrer les rapports de forces donc. Mais comment ? Par le rythme déjà. Parasite est une perle de rythme dans le sens où différentes situations appellent différents rythmes. S’il y a des moments plus lents, qui permettent d’installer les situations, les rapports entre les différents personnages, parfois l’histoire va accélérer pour que le récit puisse arriver à un certain point précis. C’est comme une respiration qui s’emballe et jamais nous ne nous sentons trop pris par la main, soit trop laissés à l’abandon pendant des heures. Toutes les accélérations, tous les ralentissements sont pensés pour que l’histoire soit fluide et ça ne vient en aucun cas combler des lacunes de scénario.

Sans concession est peut-être une expression qui peut résumer ce film. Sans concession dans la façon de montrer la société coréenne, le tout en évitant une vision trop occidentale. C’est ce que je disais par rapport au rythme. Il y a beau avoir un rythme très particulier, c’est loin d’être le rythme effréné d’un gros blockbuster occidental. Et ça a toute son importance pour le récit. Sans concession donc. Il montre certes la beauté des liens familiaux, mais aussi les déchirements, et aussi ce qu’il peut y avoir de plus difficile et d’horrible dans la société.
En terme de réalisation, ça se traduit par deux choses principalement : soit des grands angles d’exposition, soit des petits détails. Des plans serrés sur les personnages. Sur certains comportements, sur certaines expressions. Par de petits morceaux de visages, il arrive à montrer l’envie, le ressentiment et le mépris. Il nous montre tout haut ce que les gens peuvent penser tout bas. Tout y passe : la question de la réussite, de l’apparence, de l’odeur, de la misogynie. Tous ces sujets sont évoqués, sans concession dans les moindres petits détails du film. Les zooms et plans serrés sont d’ailleurs plus rapportés à la famille de Ki Woo, comme pour accentuer ce côté oppressant de leur quotidien ; surtout quand il s’agit de leur vie dans l’entresol. Le sens du détail est donc là au service du côté social du film.
Mais comme je le disais, on a aussi des grands angles qui ont cette même utilité. Les grands angles ont plus tendance à montrer l’opulence, les grands espaces, qui respirent, qui sont lumineux. On peut penser à la scène d’introduction du Père Goriot où on nous donne une pièce d’intérieur, et suivant ce qu’il se trouve dans la pièce nous pouvons deviner la situation sociale de la personne qui vit ici. Dans Parasite c’est pareil. Nous avons des plans larges dans la maison des Park, des plans larges aux tons chauds qui montrent leur richesse, leur quotidien. Mais le fait est que ces plans larges sont quand même plein de détails, d’indices sur leurs vies et sur l’intrigue à venir. Bong Joon Ho nous force à nous concentrer sur ce qu’il y a à voir sans nous noyer non plus. Il nous donne juste ce qu’il faut pour nous donner envie de continuer à le suivre dans son histoire et je trouve ça très habile.

En continuant sur la réalisation, nous pouvons nous demander s’il y a des longueurs. Comme je le disais, Parasite est un vrai bijoux niveau rythme. Mais il arrive certains moments où nous aimerions que ça passe un peu plus rapidement, surtout quand l’action prend trop de temps à se développer, mais ce ne sont que quelques instants dans tout le film. En parlant de rythme, il est intéressant de voir comment une sorte de gradation s’installe entre les différents types de séquences. Par exemple : les moments heureux durent peu longtemps, les moments violents aussi. C’est toujours très rapide et très efficace. Les moments d’angoisses et de violences morales eux sont beaucoup plus longs. C’est un moyen très pratique de faire monter la tension et l’intérêt tout en permettant de créer quelques respirations pour le spectateur qui n’est vraiment pas ménagé. Car au-delà de la violence sociale, Parasite traite également de la folie et d’une façon plutôt crue. Mais je ne vais pas rentrer dans les détails au risque de spoiler. Toujours est-il que le rythme du film et cette gradation entre les séquences est une des grandes forces d’immersion de Parasite.
Avant de passer sur le casting et terminer ce tour d’horizon de Parasite et expliquer pourquoi j’ai aimé à ce point ce film, j’aimerai parler un peu de musique. C’est assez beau de voir comment une musique qui est extradiégétique (extérieure à la fiction, pas vraiment présente dans l’intrigue ou pour les personnages) est à ce point inhérente au récit. Elle rythme et illustre le film. Parfois présente et parfois totalement absente, l’OST de Parasite est vraiment superbe et aide à la compréhension du récit et de son intensité. Quand je dis qu’elle est parfois absente, c’est que ce film nous rappelle l’importance du silence. Ces moments où on se concentre juste sur ce qu’on entend dans le film. Ces sons qui nous portent et parfois nous angoissent. D’ailleurs, le sound-design est un autre vrai point fort de ce film.
Pour résumer, j’ai été abasourdi par la réalisation de Parasite et par tout le travail qui est mis en œuvre pour le rendre immersif et surtout pour que l’on accroche totalement à son propos et à cette réflexion qu’on nous propose. Je ne vais pas paraphraser ce que j’ai déjà dit, mais je ne peux que vous conseiller d’aller voir ou revoir Parasite pour vous plonger dans la pensée de Bong Joon Ho.
Parasite, un jeu de familles

Impossible de parler d’un film sans parler de l’interprétation. Un casting, c’est une famille et ça tombe bien pour un film comme celui-ci. Je ne vais pas passer en revue tout le casting, ça serait beaucoup trop long. Mais je vais me concentrer sur ce qui m’a le plus marqué concernant les deux familles. Pour commencer, Ki Woo interprété par Choi Woo Sik. Beaucoup de monde a eu tendance à mettre Song Kang Ho en avant comme le héros du film et, même si certains moments peuvent avoir tendance à nous le faire penser, pour moi c’est passer à côté du vrai héros. Ki Woo est un vrai héros de film. Un héros minimaliste, un héros en retrait, qui se fond avec les autres. Il veut juste réussir et faire en sorte que sa famille aussi. Choi Woo Sik interprète très bien ce personnage dans le sens où ce n’est clairement pas celui qui a le plus d’expressions dans le film, mais ça fonctionne très bien. Pareil, il n’est clairement pas le plus excessif dans ses mouvements. Woo Sik joue parfaitement, sans jamais nous en dévoiler de trop.
À l’opposé, il y a le rôle de la grande sœur interprétée par Park So Dam. Elle est bien plus excessive que son frère, espiègle et limite plus manipulatrice. Elle y va plus franchement, même si en aucun cas elle ne se vantera de changer de situation. Comme son frère, comme sa famille, elle garde cette retenue. Là où Woo Sik offre un jeu plus discret, Park So Dam, elle, est plus expressive que ce soit le visage ou ses mouvements et ça offre un contraste assez intéressant avec le petit frère ou même son père ou sa mère. Pour moi, ce sont ces deux personnages que j’ai le plus apprécié dans le film autant pour leur histoire que pour leur interprétation.
Du côté de la famille Park, j’aime tout particulièrement le rôle de la mère (Cho Yeo Jeong). Elle semble dépassée, un peu tête en l’air, très stressée et « simple ». Et quelque part, c’est ce qu’elle est. Mais c’est aussi un personnage avec beaucoup plus de profondeur. C’est aussi une mère qui se bat pour le bien-être de ses enfants, qui s’en préoccupe vraiment et qui tente aussi à sa façon de rapiécer les morceaux de sa famille. Elle est loin d’être naïve, pourtant on nous la présente comme telle. C’est une des richesses d’écriture et d’interprétation parce qu’il faut aller au delà de ce qu’on veut bien nous montrer, et ça rentre totalement dans la logique du film que de vouloir nous faire réfléchir et d’aller plus loin de ce que nous pourrions penser de telle ou telle personne, de tel ou tel groupe. Cho Yeo Jeong interprète très bien cette fausse naïveté et cette envie déterminée de protéger sa famille. C’est compliqué de proposer plus que ce que le personnage doit montrer et c’est un vrai tour de force de sa part et qui m’a laissé assez impressionné.
Parasite possède un casting vraiment fort. Et en un seul article, c’est compliqué de parler de tout le monde, tant chaque rôle est important, c’est pourquoi j’ai décidé de me concentrer uniquement sur ces trois personnages. Bien sûr Song Kang Ho est admirable dans son rôle et il campe parfaitement ce père de famille qui doit se débrouiller pour que sa famille sorte de la misère. Il est admirable au même titre que le reste du casting des deux familles, mais il faudrait un autre article pour tout aborder. Je veux juste montrer à quel point les actrices et acteurs ont été bien dirigés et à quel point tous permettent ce sentiment d’être plongé dans leurs vies. Pour moi, c’est l’un des rares films récents qui m’a laissé cette impression.
Nous arrivons déjà à la fin de ce tour de vue de Parasite, il est maintenant temps de conclure.
Conclusion
Je vous remercie d’avoir lu cet article jusqu’à la fin et j’espère avoir pu transmettre l’amour que j’ai pour ce film, qui pour moi est l’une des meilleures réussites de film social. Que vous l’ayez déjà vu ou que vous ayez encore à le découvrir, j’espère qu’il vous aura autant touché que moi et qu’il vous aura autant donné matière à réflexion. Si comme je le disais plus tôt, certains moments sont un peu trop lents à mon goût et si au contraire parfois (et surtout sur la fin) il y a quelques accélérations qui permettent de faciliter le scénario, Parasite reste d’une très grande qualité. Porté par un très bon casting et surtout par une vision de la réalisation innovante, il ne vous laissera pas indifférent. En attendant un prochain article Coup de Cœur ou un prochain film de Bong Joon Ho, je vous invite à voir ou à revoir Parasite ainsi que d’autres films de Bong Joon Ho pour vous plonger dans son incroyable univers.

Sources: Asian Wiki | Hancinéma