Tout comme les Français il y a une semaine, les Sud-Coréens se sont rendus aux urnes.
Bien que les élections aient été prévues pour décembre, elles ont finalement été avancées en raison de la destitution, en mars dernier, de la présidente Park Geun Hye.
Rappelons la situation : la présidente Park Geun Hye, élue en février 2013, a été écartée de son poste suite au scandale d’octobre 2016, appelé le « Choigate », en référence à la principale coupable de l’histoire, madame Choi Soon Sil. Cet événement a mis en lumière une affaire de corruption et d’abus de pouvoir de la part de la présidente (voir l’article précédent pour plus d’informations).
Suite à cette destitution et comme il est prévu dans la Constitution, une nouvelle élection a été organisée dans les 60 jours suivants.
Si les Français ont deux tours pour choisir et élire un candidat, les Coréens ont seulement un tour pour prendre leur décision. Pour ce premier et unique tour, ce sont près de 15 aspirants au poste de président qui se sont fait face.
Parmi ce large choix (voir plus bas dans l’article), les Coréens ont décidé d’élire le candidat Moon Jae In à 41,4%. Il devient ainsi le 19e président de la République de Corée.
Qui est-il ?
Âgé de 64 ans, il est membre du Parti Démocrate Unifié (tendance de gauche libérale), c’est-à-dire un parti qui croit aux valeurs de la gauche tout en promouvant une économie libérale, ouverte à l’internationale. Il est marié et père de deux enfants (un garçon et une fille).
Fils de réfugiés nord-coréens, c’est après une enfance pauvre qu’il devient militant contre Park Chung Hee (père de Park Geun Hye), dénonçant sa politique autoritaire. Il sera arrêté à deux reprises. Par la suite, il devient avocat spécialisé dans les droits de l’homme et les droits civils.
À partir de 2003, Moon Jae In est le conseillé du défunt président Roh Moo Hyun et ce, jusqu’à la fin de son mandat en 2008. C’est en 2012 qu’il se lance à son tour en politique. Malgré une défaite aux présidentielles, il obtient un siège de député à Busan.
Lors de sa campagne, il a surtout été attaqué sur son envie d’instaurer de nouveaux dialogues avec la Corée du Nord. Ainsi, de nombreuses personnes et adversaires l’ont qualifiés de « Pro-Corée du Nord » et l’ont accusé de vouloir instaurer une politique similaire.
Son programme en quelques points
Le nouveau président possède deux priorités : l’économie avec la réduction de l’influence des « chaebols » (nom donné aux grandes entreprises industrielles coréennes) et la création de 810 000 emplois dans le secteur public. Mais surtout, dans la continuité de la politique de Roh Moo Hyun, sa deuxième priorité est d’adoucir la relation entre les deux Corées. Il souhaite développer des dialogues diplomatiques avec la capitale Pyongyang. Ces dialogues permettraient de calmer la situation actuelle, de plus en plus tendue, surtout depuis que le président Donald Trump a lancé ses troupes maritimes vers la Corée du Nord, laquelle n’a pas hésité à répondre avec de nouveaux essais nucléaires.
Moon Jae In a aussi appelé à une dénucléarisation complète de la Corée du Nord après un nouveau tir de missile de sa part, il y a deux jours.
À l’international, il veut redéfinir les échanges avec la Chine et les Etats-Unis. En effet, en raison du THAAD (Terminal High Altitude Area Defence), un système conçu pour détruire les missiles à courte et moyenne portée, la Corée du Sud est déchirée entre les pro et les anti-THAAD. Même si Moon Jae In est favorable à ce système pour créer une alliance avec les Etats-Unis, il a demandé à retarder son déploiement. Avec cette décision, il espère apaiser les tensions avec la Chine, pays qui avait presque interdit la K-pop et les dramas coréens dans son pays lorsque la Corée du Sud a montré de l’intérêt pour le THAAD. Pour contrer la menace nord-coréenne, il espère garder des bonnes relations avec ces deux puissances mais aussi avec le Japon. Cependant, il n’a pas évoqué pour le moment les rapports qu’il souhaite entretenir avec d’autres pays, comme la France.
Par ailleurs, l’ancien ministre souhaite instaurer différentes mesures sociales : aider les jeunes à trouver un emploi et mettre fin aux discriminations au travail à l’égard des femmes. Il souhaite améliorer le bien-être des personnes âgées et des plus démunis avec le versement d’une allocation de 300 000 wons par mois (soit environs 240 €).
Enfin, sur le plan écologique, il a l’intention de réduire les particules fines afin d’améliorer la qualité de l’air. Pour cela, il a ordonné la fermeture temporaire de vieilles centrales thermiques.
Ses deux concurrents principaux
Le candidat Hon Joon Pyo est arrivé à la seconde place avec 23,3% des voix. Surnommé « Hong-Trump » pour ses paroles agressives et controversées sur les homosexuels et les femmes, il appartient au principal mouvement conservateur du pays : le Parti Liberté Corée.
Pour l’économie, il promettait la création d’1,1 millions d’emplois dont 50 000 dans les PME. En revanche, considérant que la place des femmes est à la maison, il voulait doubler l’allocation versée pour les congés maternité.
Il souhaitait également renforcer ses liens avec les Etats-Unis en déployant le THAAD. Concernant la Corée du Nord, il voulait garder une politique de fermeté.
Le candidat Ahn Chul Soo est arrivé en troisième place avec un résultat de 21,8%. Dans la tendance centriste, il a conçu le « Parti du Peuple » après avoir quitté le parti démocrate. Comme Hon Joon Pyo, il voulait détenir le THAAD. Cependant, il souhaitait également développer des relations avec la Corée du Nord. Dans l’économie, si lui aussi voulait réformer les chaebols, au lieu de créer des emplois, il souhaitait investir 19 000 milliards de wons (15,2 milliards d’euros) dans la formation de 100 000 nouveaux dirigeants d’entreprises dans les nouvelles technologies.
Le nouveau président Moon Jae In a comme lourde tâche de réunifier le pays quelque peu ébranlé depuis les manifestations d’octobre contre l’ancienne présidente. Il va devoir faire oublier ce scandale et redorer l’image de la politique coréenne, surtout auprès des jeunes, envieux d’une Corée plus juste.
Sources : L’Express|L‘OBS|LeMonde|KoogleTv|Yonhap
Article de Sammin.