Avec le scandale du micro, la liberté de la presse sud-coréenne semble doucement se fissurer. Le parti du président a déposé une plainte et intenté un procès contre la MBC après la diffusion de la vidéo où le président Yoon Suk Yeol a prononcé des injures contre le gouvernement américain.
Scandale diplomatique après une injure du président Yoon Suk Yeol
Le mois dernier, le président Yoon Suk Yeol effectuait un voyage présidentiel à l’étranger. Il s’est notamment rendu à Londres, aux États-Unis et au Canada.
Lors de la septième conférence de reconstitution des ressources du Fonds mondial à New York, Yoon Suk Yeol aurait tenu des propos déplacés à l’égard des membres du gouvernement américain. Un micro ouvert et en live, était placé près du président sud-coréen. D’après la vidéo diffusée par la chaîne publique MBC (Munhwa Broadcasting Corporation), celui-ci aurait dit à ses proches, en aparté : « Comment Biden ne pourrait-il pas perdre la face si ces **** ne passent pas au Congrès ? » . Le sous-titre de la remarque diffusé avec des astérisques par MBC, a servi pour masquer l’équivalent coréen du mot « fuckers ». Dans ce contexte, la légende de la vidéo semblait indiquer que Yoon faisait référence à Biden et à son offre d’augmenter la contribution américaine au Fonds mondial. Malgré la cacophonie environnante, tout porte à croire que cela a bien été prononcé par le politicien.
L’image du politicien Yoon Suk Yeol plus que ternie
Après avoir initialement demandé aux radiodiffuseurs de ne pas publier ce commentaire, le bureau de Yoon s’est fermement opposé à cette interprétation.
Dès la diffusion de la vidéo en Corée du Sud, c’est devenu l’effervescence sur la toile. La vidéo a été vue en nombre et a fait la une des médias coréens. Les médias américains, eux, ont également largement rapporté l’insulte du président coréen à l’égard du Congrès.
Le Parti démocrate libéral (DP) coréen, issu de l’opposition, a immédiatement réagi à la remarque « immorale » et a déclaré que le voyage de Yoon était une « catastrophe diplomatique ». Suite à cela, les porte-paroles du gouvernement coréen ont tenté d’éteindre le feu. Ils se sont empressés de rejeter toute accusation de troubles diplomatiques en expliquant que le président parlait de l’Assemblée coréenne et disait qu’il serait lui-même embarrassé si l’Assemblée, actuellement aux mains de l’opposition, s’opposait aux 100 millions de dollars qu’il a promis de verser au Fonds global. Yoon s’est aussi fermement opposé aux remarques illustrées dans la vidéo, affirmant qu’il ne faisait pas réellement référence au président américain
En représailles, la presse coréenne est attaquée et une plainte est déposée
Dans un premier temps, lundi 26 septembre, Yoon a commencé par critiquer la presse et a caractérisé les articles comme étant des relais inexacts de ses propos. Il a aussi ajouté que ces derniers ont porté atteinte à l’alliance américano-coréenne. Depuis l’incident, aucune des prises de position du président ou de son bureau ont fait mention de ce qu’il aurait réellement dit et aucun commentaire n’a été dit sur le langage fleuri du dirigeant.
Jeudi 29 septembre, le Parti du peuple (PPP), parti politique du président, décide d’intenter un procès contre la chaîne locale après le dépôt de sa plainte lundi après-midi contre quatre supérieurs de la MBC pour diffamation.
Lors d’un commentaire adressé au Parlement, l’un des représentants du PPP, Chung Jin Suk, déclare : « MBC poursuit des reportages qui portent atteinte à l’intérêt national… Ils doivent s’excuser ».
D’après une dépêche publiée par l’AFP, la MBC a nié en bloc tout acte répréhensible, déclarant que leur décision de diffuser ces commentaires « a été prise légitimement (..) sans jugement » avant d’ajouter, « nous espérons que les attaques contre la MBC ne sont pas une tentative de bâillonner la mission de la presse de contrôler le pouvoir ». (propos relayés par l’agence de presse AFP)
Le 30 septembre, les associations de presse de cinq radiodiffuseurs en Corée du Sud ont publié une déclaration conjointe, critique à l’égard des actions du bureau du président et soulignant l’éventuel danger à venir pour la presse que représente ce ciblage arbitraire contre un média.
Source : AFP | KoreaJoongAng Daily | IFJ
Source image : Republic of Korea