Mélange de théâtre, de danse et de chant, le talchum est un symbole culturel et folklorique reconnu en Corée du Sud. Déguisés en nobles, concubines, serviteurs ou dieux, les comédiens traitent par la satire la vie quotidienne du peuple coréen par cette danse masquée.
Les caractéristiques du talchum
Par son étymologie, le talchum est une danse masquée. En coréen, « tal » signifie masque et « chum » la danse. Les comédiens déclament des chants et dialogues transmis oralement de génération en génération. Ils sont accompagnés de musiciens. Les instruments utilisés sont essentiellement le haegeum (violon), le daegeum (flûte), le janggu (tambour de sablier) et le buk (tambour de baril). Les danses sont énergiques et souvent constituées de saut.
Il y a plusieurs actes. Les scènes se succèdent sans forcément avoir de liens entre elles. Les thèmes peuvent être variés. Cependant, il existe des scènes récurrentes comme celles du noble décadent, du moine infidèle et du mari patriarcal. À travers ces trois sujets, on aperçoit le but du talchum : le peuple coréen représente leur quotidien et les injustices qu’ils subissent de la part de la classe dirigeante. À travers ces danses, les acteurs utilisent les traits grossiers des masques et une mise en scène comique pour se moquer. L’humour et la satire sont là pour traiter des problèmes sociaux. Le masque est aussi un gage de sécurité pour le comédien qu’on ne peut pas reconnaître. Le talchum est devenu une forme de liberté d’expression pour la population.
Originaire de la province de Hwanghae (en Corée du Nord), le talchum s’est diversifié. Le genre de danse masquée varie d’une région à l’autre et se déroule pendant les fêtes traditionnelles et autres occasions spéciales.
L’originalité du talchum est certainement l’interaction avec le public. L’emplacement de la représentation est un espace rond et en plein-air. Le public est assis autour de la scène et ses exclamations font progresser l’histoire. Il n’est pas rare qu’un spectateur soit invité à venir sur scène par l’un des personnages. La distance que l’on a dans une pièce de théâtre traditionnelle est ainsi inexistante.
Les personnages masqués
Les masques étaient à la base des objets sacrés, utilisés pour les différents rites chamaniques. Au fil du temps, certains de ces masques ont été intégrés au talchum.
- La mariée (Gaksi) : au village Hahoe, elle représente la déesse protectrice Seonangsin. D’après la légende, une jeune femme mourut après avoir eu le cœur brisé et fut transformée en déesse locale.
- Le lion (Saja) : cet animal a le pouvoir de renvoyer les esprits maléfiques et d’apporter la chance. Le masque du lion a les yeux dorés. Le bongsan et gangnyeong talchum font rouler ses yeux et accrochent une cloche sur sa tête.
- Les dieux des cinq directions (Obangsinjang) : cinq acteurs dansent pour expulser les mauvais esprits du lieu en portant des masques et costumes d’une couleur différente (bleu pour l’est, blanc pour l’ouest, rouge pour le sud, noir pour le nord et enfin le jaune pour le centre).
- Nunggeumjeogi et Yeonnip : personnages religieux symboliques punissant les moines corrompus.

Les masques du talchum sont distordus et exagérés pour le comique. Ils représentent des gens issus de sexe, de classe et d’âge différents. Selon la région du talchum, les masques sont modelés différemment bien que les personnages principaux soient les mêmes. On peut compter plus d’une vingtaine de personnages lors d’une représentation.
- Le serviteur (Malddugi) : ses traits sont plus larges que les autres montrant ainsi qu’il écoute et regarde attentivement les complots des nobles.
- Le noble (Yangban) : représenté déformé, le masque exprime la vanité, la corruption et l’hostilité du peuple pour la classe dirigeante.
- Le monstre légendaire (Yeongno) : expulsé du paradis pour avoir péché, il ne pourra y retourner qu’après avoir manger 100 nobles.
- L’ivrogne (Chwibari) : il joue le rôle de celui qui punit le moine dépravé. Sa face rouge montre son côté aggressif alors que ses yeux suggèrent un esprit énergique.
- Le vieux moine (Nojang) : sa face noire est là pour dénoncer la méchanceté et la corruption des moines bouddhistes. Il renie sa religion après être tomber amoureux de Somu.
- Le moine dépravé (Omjung) : ce personnage dénonce les religions importées. Il se moque de son professeur, le vieux moine. Il est aussi vulgaire et impoli.
- La petite chamane (Somu ou Somaegaksi) : elle joue le rôle de gisaeng et flirte avec le vieux moine avant l’intervention de l’ivrogne. Son visage est blanc et porte du rouge.
- La vieille femme (Miyalhalmi) : abandonnée par son mari, elle représente la pauvreté et la soumission des femmes dans une société patriarcale. Sa face est sombre et il lui manque des dents.
- Le vieil homme (Yeonggam) : mari de la vieille femme, il la maltraite et possède une concubine.
- La concubine (Deolmeorijip) : maîtresse du vieil homme, c’est une jeune femme similaire à la chamane.
Les masques d’Hahoe ont une particularité : le menton est séparé du visage afin de faire bouger la bouche. Les 9 types de personnages représentés sont la mariée, le noble, l’artiste féminin, le moine, le serviteur, l’érudit, l’ingérence, le boucher et la grand-mère. À l’origine, il y en avait trois autres, le Bachelor, Ddeokdari et Byeolchae, mais ceux-ci ont été perdus pendant la période coloniale japonaise. Avec les 2 masques d’oiseaux Juji et 2 types de masques Byeongsan, les 9 masques Hahoe sont désignés « Trésor national n ° 121 ».
Pérennité du talchum
Le talchum est un héritage culturel important car il représente la pensée du peuple coréen passé. Néanmoins, il est devenu un divertissement folklorique. Le masque est un objet de souvenir populaire parmi les touristes. À l’occasion de festivals, comme celui d’Andong, il est possible de fabriquer un masque et d’apprendre les danses en parallèle des représentations.
Une candidature a été déposée en début d’année par l’Administration du Patrimoine culturel pour inscrire le talchum au Patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO. Le résultat sera connu pour la fin d’année 2022.
En complément de cet article, je vous laisse avec ce documentaire (en anglais) de 25 minutes réalisé par Arirang TV. Vous pouvez non seulement voir la beauté du village Hahoe mais également des extraits de représentations de talchum pour mieux visualiser tous ces aspects.
Source : Korea.net| KoreaTimes | Yonhap