Kim Jeong Hui 김정희 (1786-1856), de son nom de plume Chusa 秋史, est l’un des plus grands artistes de la dynastie Joseon. Une harmonie entre art et sagesse, qui a fait de lui un maître à penser en matière de calligraphie.
Biographie
Originaire de Yesan, Kim Jeong Hui grandit au sein d’une famille aisée, et reçoit une éducation stricte et complète. Dès l’âge de 23 ans, il passe les concours d’État, et en 1809 il part à Pékin avec son père qui accompagne la délégation coréenne. Il y étudie la culture chinoise, et rencontre de grands lettrés chinois, qui forgent chez lui un intérêt particulier pour la calligraphie. C’est pour lui une chance inouïe qui va hâter sa formation intellectuelle.
De retour en Corée, il devient l’élève de Park Jega 박제가, un maître à penser de l’école du Shilak 실학, ou l’École du réel. Ce mouvement intellectuel, que l’on peut traduire par « Études pratiques », vise à créer une société sans classes, où tous ont le même droit à la connaissance, et que les terres soient réparties équitablement, pour permettre à chaque famille de subvenir à ses propres besoins. Ce mouvement a été mis en place notamment pour éradiquer la corruption grandissante du gouvernement coréen de la dynastie Joseon.
Il deviendra par la suite l’instructeur du Dauphin, jusqu’à la mort de ce dernier. Pour cause de rivalités à la cour, il est séparé de sa famille et envoyé en exil sur l’île de Jeju en 1840.
Exil
Victime de querelles intestines au sein du gouvernement, Kim Jeong Hui est envoyé en exil en 1840 sur l’île de Jeju, au sud de la péninsule. Séparé de sa famille, il se tourne vers la calligraphie, et approfondit sa pratique et sa dextérité. L’un de ses plus proches amis, poète et calligraphie lui aussi, fervent admirateur de la calligraphie chinoise, rassemble de nombreux ouvrages intellectuels au cours de ses multiples voyages en Chine, qu’il offre à Kim Jeong Hui, permettant à ce dernier de parfaire ses connaissances et sa technique en la matière. Il se lance dans la peinture et se spécialise dans les orchidées et les paysages. Il écrit un ouvrage d’épigraphie historique, le premier en son genre, créant alors son propre style calligraphique, le Chusache. Les intellectuels et lettrés chinois se prennent d’intérêt pour son travail, et sa calligraphie devient un style à part entière.
Neuf ans après son envoi en exil, Kim Jeong Hui peut de nouveau retrouver son village natal. Il se tourne vers le bouddhisme, et certaines rumeurs voudraient qu’il soit devenu moine. Il ne cessera cependant d’écrire, jusqu’à sa mort.
Son œuvre
Kim Jeong Hui, ou Chusa 추사 de son nom d’artiste, est notamment reconnu pour l’invention de son propre style calligraphique, le Chusachae 추사체, une version dite « tremblée », qui se distingue du style habituel utilisé jusqu’à lors.
Son style est décrit comme une harmonie entre passion, connaissance, et talent artistique. L’originalité de sa calligraphie s’explique par son envie de partager ses émotions au travers de son art. Au cours de son exil, séparé de sa famille, et après la mort de sa femme, Kim Jeong Hui se retrouve seul, face à une société dans laquelle il ne se reconnaît pas. Il se tourne vers la calligraphie et le bouddhisme, et unit ces deux intérêts qui lui sont chers dans un style qui lui devient propre. Ce style dit « tremblé », est un symbole de sa tristesse, mais aussi de l’espoir qu’il entrevoit et nourrit de son art.
Il est aussi connu pour ses nombreuses peintures à l’encre, notamment de paysages et de fleurs, qu’il accompagne parfois de ses propres poèmes, et qui plait tant aux artistes et intellectuels chinois de son époque. Une œuvre en particulier est encore aujourd’hui considérée comme l’une des plus originales et authentiques : le Saehando. Kim Jeong Hui offre cette peinture à son élève Yi San Jeok, qui lui avait toujours montré son soutien lors de son exil. Classé Trésor national (n°180), l’œuvre est un équilibre entre l’encre noire, et le blanc pur du papier, qui crée l’harmonie du paysage, entre l’habitation et les arbres de pin qui s’allongent près de ce qui symbolise l’exil de l’artiste, partageant l’émotion que ressent le peintre. Kim Jeong Hui y annote une lettre pour son élève, le remerciant de sa loyauté et des services qu’il lui a toujours rendu, avant et pendant son exil. Le texte est rédigé dans un style calligraphique proche de la perfection, épuré et empreint d’émotion. Yi San Jeok portera l’œuvre jusqu’en Chine, où de nombreux artistes et calligraphes chinois commenteront sur son travail, le plaçant au rang de calligraphe le plus important de son époque.
Kim Jeong Hui est considéré comme l’un des calligraphes les plus importants de la péninsule. Calligraphe, artiste et homme politique, son ouverture d’esprit, notamment sur l’acceptation des cultures étrangères, a fait de lui une figure phare dans l’histoire du Shilak 실학, et dans la société coréenne. Encore aujourd’hui, son talent artistique et ses écrits historiques forgent de nombreux aspirants et calligraphes de renommée. Après avoir enseigné à plus de trois mille élèves de son temps, ses connaissances et son art continuent aujourd’hui de percer l’art moderne.
Sources : ArirangTV | FranceCulture
Article rédigé par Kim.