Les tensions entre les deux Corées sont malheureusement récurrentes malgré le statu quo. Parmi celles-ci, avez-vous entendu parler de l’incident du peuplier, survenu le 18 août 1976 ? Aussi appelé « incident du meurtre à la hache », cet événement a bien failli relancer une guerre.
Origine et déroulement de l’incident du peuplier
Le 18 août 1976 en fin de matinée, une opération est menée pour abattre un peuplier qui gêne la vue depuis un poste d’observation de la zone démilitarisée (DMZ). Cette « frontière » entre le Nord et le Sud de la Corée a été créée le 7 juillet 1953 au moment de l’armistice de Panmunjeon, à la fin de la guerre. Pour en savoir plus à ce sujet, direction cet article !
Bien que continuellement en tension, les patrouilles à l’intérieur de la JSA (Joint Security Area) se faisaient librement sans armes lourdes.
Une dizaine de soldats sud-coréens et américains, dont deux officiers, se rendirent sur place et commencèrent à ôter les branches de l’arbre. Des soldats nord-coréens en patrouille arrivèrent rapidement sur les lieux. Le lieutenant Pak Chul demanda l’arrêt total en arguant que le peuplier fut « planté » par Kim Il Sung, le fondateur de la République populaire de Corée. Ignorant à deux reprises les injonctions nord-coréennes, le capitaine Bonifas ordonna de continuer l’opération. Le lieutenant Pak Chul avait appelé des renforts, amenant avec eux des pieds-de-biche et gourdins par camion. Face au refus, le lieutenant Pak donna l’ordre de tuer tout le monde.
Bien que l’attaque ne durât pas longtemps, les conséquences furent graves. Le lieutenant Pak assomma le capitaine Bonifas, qui fut par la suite frappé à mort par les soldats nord-coréens. Sur l’ensemble des soldats sud-coréens et américains, un seul fut totalement épargné de blessures.
Les soldats nord-coréens furent dispersés en peu de temps et le corps du capitaine Bonifas put être ramené. Mais le deuxième officier, Mark T. Barrett, fut porté disparu une heure après l’attaque. Pendant ce temps, des Nord-Coréens furent aperçus depuis le poste d’observation, hache à la main, descendant dans un creux près du lieu de l’incident. C’est là que s’était réfugié le lieutenant Barrett. Il mourut de ses blessures dans l’hélicoptère en charge de l’évacuer.
L’opération Paul Bunyan
Face à la violence de l’attaque, le secrétaire d’État, Henry Kissinger, conseilla au président américain Gerald Ford de lancer des bombardements en représailles. Voulant éviter un conflit imprévisible et l’intervention de l’URSS et de la Chine, il refusa.
Une nouvelle opération fut montée : des soldats, ingénieurs, troupes de combat, forces spéciales et des bombardiers furent envoyés. Impressionnant déploiement de force pour seulement un arbre. L’opération fut nommée « Paul Bunyan », du nom d’un bûcheron géant, héros légendaire. Elle a eu lieu le 21 août 1976.
Des soldats nord-coréens étaient sur place avec des mitrailleuses mais le conflit ne fut pas déclenché car la souche du peuplier fut laissée sur place. Il ne resta de l’arbre plus que six mètres de haut.
Les conséquences de l’incident du peuplier
Après l’incident du peuplier, la Corée du Nord, la Corée du Sud et les Nations Unies furent limitées dans les déplacements de leurs patrouilles, chacune devant rester à l’intérieur de sa propre zone.
Le « pont de Non-retour », proche du lieu, fut définitivement fermé. Ce pont faisait partie de la zone sud-coréenne de la JSA et les soldats nord-coréens étaient obligés de l’utiliser pour retourner dans leur pays. Ils construisirent en trois jours un autre pont pour pallier à ce problème. C’est le « pont de 72 heures ».
En 1986, lors du dixième anniversaire commémorant l’incident du peuplier, le camp « Kitty Hawk », qui sert de base aux Nations Unies, fut rebaptisé camp « Bonifas » en hommage au capitaine. Un monument mémorial a également été édifié. La souche fut finalement enlevée et est maintenant exposée au centre d’accueil de la JSA.
Sources : Libération | Le Figaro | Korea Herald | NK News
Sources images : Le Figaro | Curieuses Histoires