Le 17 novembre 2020, l’OHI (Organisation Hydrographique Internationale), qui fixe les normes des cartes maritimes depuis 1921, est parvenue à un accord qui permettrait d’identifier les mers par des numéros et non plus des noms spécifiques. Certains se demandent alors si cela pourrait diminuer des tensions liées à l’appellation de la mer située entre la péninsule coréenne et le Japon. En effet, tandis que les Coréens la désignent sous le nom de « mer de l’Est », les Japonais utilisent le terme « mer du Japon ».
Une mer à la source de tensions inter-étatiques
La mer qui se situe entre la Corée et le Japon est un des nombreux sujets à la source de conflits entre ces deux pays, au même titre que les « femmes de réconfort » ou les rochers Liancourt. Le nom de la mer est disputé depuis au moins 1787, date à laquelle la désignation « mer du Japon » est devenu usuelle.
En 1928, cette appellation est officialisée par l’OHI. Mais elle est dénoncée par les Coréens lors de la conférence de Monaco, à laquelle ils ne peuvent pas participer en tant que nation indépendante à cause de la colonisation de la péninsule par le Japon. Depuis, Séoul ne cesse de demander à ce que les deux noms (« mer du Japon » et « mer de l’Est ») soient juxtaposés sur les cartes du monde.
Lors d’un sommet de Coopération économique pour l’Asie-Pacifique en 2006, le président sud-coréen Roh Moo Hyun propose alors au Premier ministre japonais Shinzo Abe de régler ce conflit en désignant la mer sous le nom de « mer de la Paix ». Mais cette proposition reste sans suite.
L’OHI confirme à nouveau la dénomination unique « mer du Japon » en 2012 et rejette les demandes de la République de Corée. Mais à la suite des efforts menés par le gouvernement sud-coréen pour démocratiser l’appellation « mer de l’Est », l’OHI commence des consultations officieuses entre les deux Corée et le Japon dès 2017. En effet, la double inscription avec « mer de l’Est » sur les cartes mondiales passe de 2,8 % en 2002 à plus de 40 % en 2020.

Un accord historique et inédit de l’OHI
L’OHI semble par conséquent avoir trouvé un terrain d’entente grâce à l’instauration d’une nouvelle norme, proposée l’année dernière par son secrétaire général. En effet, 65 États membres de l’Assemblée de l’OHI ont proposé d’adopter la nouvelle norme S-130, afin de remplacer la norme actuelle S-23, devenue obsolète. La norme S-130 va alors être au cœur des prochaines discussions, afin de la présenter à la réunion de l’Assemblée en avril 2023.
L’accord va bénéficier à la Corée, car le Japon ne pourra plus justifier l’appellation « mer du Japon » en citant les normes de l’OHI : alors que la norme actuelle S-23 (qui considère l’appellation « mer du Japon » comme l’unique nom officiel) restera en version papier sans passer au numérique, elle ne sera pas réimprimée. Lorsque la nouvelle norme S-130 sera introduite, la désignation « mer du Japon » disparaîtra sur les cartes numériques et cèdera sa place à une appellation chiffrée.
Vers une fin des tensions… ou pas
Selon la ministre sud-coréenne des Affaires étrangères, cette décision de l’OHI, qui devrait être finalisé le 1er décembre, clôt ainsi des décennies d’efforts diplomatiques menés par la Corée du Sud afin de réviser l’appellation officielle de la mer qui la sépare du Japon. Pyongyang a également répondu positivement à la proposition de l’OHI.
Le fait que cette mesure « dégrade » l’appellation actuelle fait réagir les autorités japonaises. Les médias nippons interprètent d’ailleurs cette mesure autrement : ils déclarent en effet que l’appellation « mer du Japon » sera toujours utilisée pour les cartes internationales.
Tout cela confirme que les tensions concernant ce bras de mer ne sont pas sur le point de s’arrêter malgré cet accord, d’autant plus que dans la pratique, les applications concernées par cette nouvelle norme conserveront sans doute les anciennes appellations aux côtés des nouvelles, pour des raisons de praticité.
Sources : Yonhap News Agency | KBS World Radio