Les catastrophes nucléaires sont un sujet prédominant depuis les années 1980 et l’explosion de la centrale de Tchernobyl. Ce phénomène, qui a particulièrement touché les sociétés asiatiques et été relancé lors de l’accident de Fukushima et par les débats sur les alternatives à l’énergie nucléaire, est ici au centre du film de Park Jung Woo (Dance With The Wind, Deranged). Netflix, qui n’en est pas à sa première production coréenne (Forgotten ou Okja) propose avec Pandora un film catastrophe, posant néanmoins des questions importantes sur la viabilité et la dangerosité du nucléaire.
Informations
Titre original : 판도라
Romanisation : Pandora
Réalisation : Park Jung Woo
Scénario : Park Jung Woo
Production : Netflix Original Movies
Genres : drame, catastrophe
Pays d’origine : Corée du Sud
Sortie : 7 décembre 2016
Durée : 136 minutes
Disponibilité : Netflix
Synopsis
Au coeur de la Corée du Sud, un petit village vit essentiellement de l’exploitation de la centrale nucléaire locale. Vue comme une bénédiction pour le village, un employé de celle-ci (Jung Jin Young) fait remettre au président sud-coréen (Kim Myung Min) un inquiétant rapport concernant le complexe et son état. Ignoré par son propre gouvernement, le président assiste impuissant à l’explosion d’une partie de la centrale à la suite d’un important séisme. Jae Hyeok (Kim Nam Gil), condamné à travailler dans la centrale avec ses amis, doit alors faire appel à tout son courage pour sauver la situation sur les lieux alors que le président fait face aux pressions pour essayer de trouver une solution à ce désastre et endiguer les radiations.
Casting
Bande-annonce
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Analyse du film en trois aspects
Il est toujours difficile de parler de films catastrophe tellement ils sont clivants. Ils sont souvent critiqués pour leur faiblesse scénaristique et les facilités déployées à l’écran. S’ils ont régulièrement l’occasion de parler de sujets importants, notamment des sujets écologiques, les messages véhiculés sont pour la plupart noyés sous une débauche d’effets spéciaux et de raccourcis menant souvent à une fin très attendue.
Parler d’un film catastrophe c’est se heurter à des personnages peu développés dans leur caractère et une histoire qui accélère aux moments où on s’y attend le plus. 2012, Le Jour d’Après : autant d’exemples qui semblent appliquer cette théorie. Pourquoi est-ce que Pandora échapperait à cette règle qui s’applique à bien des films du genre ?
Ce serait mentir de dire que Pandora est exempt de toutes les facilités inhérentes à ces films. Pourtant, au-delà des scènes très émotionnelles et des divers deus ex machina, Park Jung Woo nous propose un film qui pose les bases d’une réflexion intéressante sur le nucléaire, que ce soit sur l’impact sur la société et les gens ou sur l’aspect très politique de la question. Et c’est grâce à la superposition de trois points de vue principaux que la question est abordée sous toutes ses coutures.
Le paradoxe du nucléaire au coeur du film
Trois aspects donc. Le premier est clairement celui du danger que fait peser le nucléaire sur la population et le peu d’écho que ce danger peut avoir sur les citoyens eux-mêmes. Bien qu’aujourd’hui il soit de plus en plus décrié, il reste la principale source d’énergie dans le monde et fait l’objet d’un paradoxe. On craint le nucléaire, on le critique pourtant on continue à l’accepter malgré nous.
Pandora montre toute l’ampleur de ce paradoxe, surtout à travers le personnage de la tante de Jae Hyeok (Kim Young Ae). Elle a vu son frère et son petit-fils mourir dans la centrale et pourtant elle continue à avoir une confiance aveugle en la sûreté des lieux et pousse Jae Hyeok à travailler là-bas. Bien entendu les discours tenus sont très radicaux, sans beaucoup d’argumentation et avec des paroles fortes, histoire de coller au thème du film catastrophe. Cela permet cependant de voir cet aspect que l’on aborde peu souvent en général. Commence à se dessiner ici la métaphore de la boîte de Pandore.
Il y a là un message sous-jacent au film de Park Jung Woo : dans l’histoire il a fallu que des catastrophes aient lieu pour que les choses avancent. Il y a une certaine importance à montrer ce discours d’acceptation des situations dangereuses, que ce soit une foi aveugle ou bien une indifférence résignée de ceux qui ont toujours vécu à l’ombre de la centrale. Montrer cette complexité est important même si le genre du film fait que ces parties prennent finalement peu de place par rapport à l’intrigue principale. Mais on peut toutefois se féliciter qu’elles existent.
La mise en scène des enjeux politiques
Autre aspect du film, son côté éminemment politique. On a tous en tête les discussions nébuleuses des politiciens sur le sujet, les pressions des lobbies. Que faire quand l’économie de tout un pays est en jeu ? Doit-on sacrifier des milliers de vies aux dépens de la croissance économique ? Telles sont les questions qui s’imposent au président sud-coréen, brillamment et très sobrement interprété par Kim Myung Min.
Alors, excès de moralisme ou questions pertinentes sur nos sociétés modernes ? C’est à chacun de se faire son avis là-dessus. Il est tout de même louable de constater qu’une remise en cause du nucléaire puisse être possible dans un film de ce genre. La boîte de Pandore qui nous fait tous vivre ne serait-elle pas l’énergie qui nous détruira finalement ? Tout du long, ce questionnement demeure et influe sur les décisions qui sont prises.
On peut regretter la façon très manichéenne dont ces questions sont posées et sans jamais vraiment aller en profondeur sur le sujet. On reste un peu sur notre faim de ce côté-là. Heureusement l’aspect émotionnel du film permet de combler ce sentiment sans pour autant effacer les questions soulevées par Park Jung Woo.
Au coeur de l’enfer et de l’émotion
Le dernier angle du film est celui des personnes travaillant à la centrale au moment de la catastrophe. C’est peut-être l’angle qui rassemble les meilleurs comme les pires passages du film. Forcément comme c’est le coeur de l’action, tous les effets spéciaux, tous les moments grandiloquents et très émotionnels sur les valeurs et le sacrifice sont concentrés dans la centrale nucléaire. Il faut le dire, ces passages ajoutent une certaine lourdeur nous rappelant bien quel type de film est Pandora. Pourtant, Kim Nam Gil reste très juste dans son rôle jusqu’à la fin et permet de redresser un peu la barre sans trop de pathos.
C’est par ses yeux que l’on vit le drame et le personnage de Jae Hyeok reste assez sobre pour ne pas nous noyer sous une tonne d’émotions et de larmes. L’accent est plus mis sur son combat personnel entre le fait qu’il voulait fuir ce lieu et le fait qu’il va tout faire pour sauver le plus de personnes possible, plus que sur la débauche d’émotions qui pourrait émaner d’un tel personnage. Même si c’est le cas parfois ce n’est pas pendant tout le film et ça permet d’installer un certain équilibre qui rend le tout un peu plus agréable qu’un film catastrophe basique.
Conclusion
Avec Pandora on a donc un film catastrophe qui respecte tous les codes du genre : émotions, effets spéciaux et surplus de situations dramatiques. Mais c’est un film catastrophe qui garde un certain équilibre entre visuel et scénario. Scénario qui est bien présent, offrant une réflexion intéressante sur le nucléaire, le tout appuyé par un jeu d’acteur plutôt juste et sobre. Pandora est un bon compromis entre le sensationnel et le traitement d’une problématique d’actualité. Le fait qu’il soit produit par Netflix et qu’il ne soit pas trop consensuel est définitivement à porter à son crédit.
Sources : Hancinéma │ Asianwiki
Article rédigé par Dahlia.