Sorti en 2016, Amande de Sohn Won Pyung est rapidement devenu un best-seller en se vendant à plus de 600 000 exemplaires en Corée ! Recommandé par Nam Joon du groupe BTS, le roman a été publié l’année dernière en France chez Pocket Jeunesse.
L’autrice, Sohn Won Pyung
Née en 1979, Sohn Won Pyung travaille dans le cinéma avant de devenir romancière. Elle étudie la sociologie et la philosophie, des domaines qui lui servent dans l’écriture de ses œuvres, puis elle se spécialise dans la réalisation de films à l’académie coréenne des arts cinématographiques.
Ayant écrit sous différents pseudonymes pendant des années, Sohn Won Pyung s’est remise à l’écriture après la naissance de son premier enfant et remporte un prix littéraire pour son premier roman, Amande, en 2016. Celui-ci est traduit en treize langues et distribué dans douze pays, fait rare pour un premier roman.
Résumé d‘Amande
Amande est un roman de passage à l’âge adulte, invitant à accepter les différences.
On y suit Yun Jae, un jeune garçon qui souffre d’alexithymie : à cause d’une amygdale trop petite (dont le sens étymologique est « amande »), il ne peut identifier et décrire les émotions. Alors que la première partie du roman se concentre sur sa famille et son enfance, la seconde raconte comment Yun Jae se lie d’amitié avec Gon, un garçon qui, à son contraire, ne peut contrôler ses émotions. Au cours du roman, Yun Jae fait également la connaissance de Do Ra, une fille différente des autres, à sa manière.
Mon avis sur Amande
Un roman facile à lire et à comprendre
Tout d’abord, par son vocabulaire simple et fluide, Amande peut se lire d’une traite ! Ses chapitres courts et leurs cliffhangers n’incitent pas non plus à arrêter la lecture de ce roman jeunesse.
Avant de lire Amande, je n’avais jamais entendu parler de l‘alexithymie. J’ai donc apprécié le fait que l’autrice en explique les manifestations, pour qu’on puisse aisément comprendre le comportement de Yun Jae.
Je regrette juste que la traduction en français se soit faite depuis l’anglais et non le coréen, car certaines nuances dans les propos se sont certainement perdues dans les traductions.
Des personnages attachants
Les personnages sont tous facilement reconnaissables et développés, notamment grâce à l’utilisation de flash-back. Ainsi, on s’attache très facilement aux personnages du roman, tels que la mère et la grand-mère de Yun Jae, Do Ra et le docteur Shim, qui se montre ouvert d’esprit et prêt à aider le protagoniste à comprendre sa maladie.
Le roman étant écrit à la première personne, on s’identifie aussi rapidement à Yun Jae et on ressent beaucoup d’empathie pour lui, même s’il n’éprouve aucun sentiment (tout du moins, au début de l’histoire…).
J’émets quelques réserves concernant Gon, trop « cliché » : le rôle du bad boy qui est en réalité gentil, mais qui agit ainsi à cause de la société, est surreprésenté dans la littérature jeunesse. L’autrice veut que nous ayons de la sympathie pour lui, mais le fait qu’elle ne critique pas son comportement, et au contraire, cherche à le justifier, m’en empêche.
Amande : quelle place pour les émotions dans une société conformiste ?
À travers le parcours de Yun Jae, l’autrice réfléchit à la place des émotions dans la société coréenne. La mère de Yun Jae, pour le protéger, lui enseigne comment réagir « de la bonne manière » à chaque situation, car il n’est pas bien vu de ne pas avoir d’émotion.
Mais le parallèle effectué entre Yun Jae et Gon, nous amène à nous interroger sur ce postulat. Si Yun Jae (qui ne ressent aucune émotion) envie Gon (qui se laisse contrôler par ses émotions), ce sentiment est, paradoxalement, réciproque. On dit qu’il faut exprimer ses émotions, mais comme le rappelle l’autrice, « trop d’honnêteté blesse les gens ».
Dans ce cas, ne serait-il pas mieux de contrôler ses émotions et de choisir comment réagir à certaines situations ? Dans la société sud-coréenne, il ne faudrait pas montrer ses émotions, mais plutôt celles que la société veut qu’on utilise. En choisissant les émotions qu’il exprime, Yun Jae peut ainsi décider de la manière dont il sera perçu.
« J’avais découvert que si je gardais le silence quand j’étais censé être en colère, cela me donnait l’air patient. Si je ne disais rien lorsque j’étais censé rire, on me trouvait sérieux. Et si je restais muet lorsque j’étais censé pleurer, alors on me prenait pour quelqu’un de fort. Le silence était d’or. Je continuais en général à dire « Merci » et « Je suis désolé ». C’étaient les mots magiques qui me sortaient de presque toutes les situations difficiles. »
Sohn Won Pyung, Amande, page 49
Conclusion
Yun Jae, Gon et Do Ra ne sont pas ce que la société attend d’eux. Malgré tout, ils trouvent chacun une manière d’utiliser leurs différences pour survivre. Et si on peut être, à certains moments, frustrés que Sohn Won Pyung n’approfondisse pas ses réflexions, on ne peut qu’apprécier le réalisme de ce récit jeunesse qui montre que certaines actions peuvent avoir de graves répercussions.
En somme, je recommande cette invitation à accepter les différences dans la société du paraître qu’est la société sud-coréenne.
Où trouver Amande de Sohn Won Pyung ?
Sohn Won Pyung, Amande, traduction par Sandy Joosun Lee (du coréen vers l’anglais) et Juliette Lê (de l’anglais vers le français), Pocket Jeunesse, 336 pages, 2022 (ISBN : 2266307738).
Vous pouvez lire gratuitement un extrait du roman sur le site de Pocket Jeunesse.
Source image : site de Pocket Jeunesse