Ce 6 avril, la presse américaine a révélé la fuite de documents confidentiels, qui suggèrent que les autorités américaines auraient espionné des hauts responsables sud-coréens.
La place de la Corée du Sud dans le conflit en Ukraine
Depuis février 2022, la guerre en Ukraine oppose indirectement les États-Unis et l’OTAN à la Russie. Sous l’impulsion de son nouveau président, la Corée du Sud se rapproche des États-Unis, notamment afin de faire face aux menaces nucléaires nord-coréennes. Pour ce faire, la Corée du Sud expédie de l’aide humanitaire à l’Ukraine, applique les sanctions internationales contre la Russie et fournit des armes à la Pologne, membre de l’OTAN.
Mais la question de l’envoi d’armes en Ukraine pose problème. En effet, la Corée du Sud tient à préserver ses relations avec la Russie et craint que Moscou puisse riposter en aidant la Corée du Nord à développer son programme nucléaire. La Corée du Sud tient ainsi à rester neutre : la loi sud-coréenne interdit au gouvernement de fournir des armes aux pays engagés dans un conflit, ce qui rend impossible la fourniture d’armes à l’Ukraine sans changement législatif.
Fuite de documents confidentiels américains impliquant les autorités sud-coréennes
Le 6 avril 2023, le New York Times explique que des documents confidentiels américains ont fuité sur la plateforme Discord. Ces documents contiendraient des conversations privées tenues entre hauts responsables sud-coréens, suggérant que les autorités américaines auraient espionné des discussions internes entre la Corée du Sud et l’Ukraine.
Les documents citent un rapport de renseignement dans lequel l’ancien directeur du Conseil de sécurité nationale sud-coréen se serait opposé à la vente de cartouches de munitions à la Pologne, pour ensuite les acheminer vers l’Ukraine. Toujours selon les documents, les hauts responsables coréens auraient exprimé des réserves sur cette livraison, qui violerait la législation coréenne. Un autre document « secret » montrerait un calendrier de transfert de munitions sud-coréennes et indiquerait que des cartouches d’obus devraient être amenées en Ukraine en quarante et un jours.
Des doutes quant à la véracité de ces documents confidentiels
La Maison-Blanche a sous-entendu la véracité des documents : « Il n’y a aucune excuse à ce que de tels documents se retrouvent dans le domaine public. (…) Ils méritent d’être protégés ».
Du côté de la Maison Bleue, on estime qu’un « nombre considérable » de documents auraient été falsifiés, sans préciser lesquels. Le 11 avril, le directeur adjoint de la sécurité nationale de Séoul déclare à la presse que rien n’indique une « intention malveillante » des États-Unis.
L’opposition politique sud-coréenne, quant à elle, appelle le gouvernement de Yoon Suk Yeol à protester contre les États-Unis. D’aucuns se demandent si le déplacement précipité du bureau présidentiel dans un complexe du ministère de la Défense n’a pas facilité la mise sur écoute des réunions confidentielles. Des accusations fermement réfutées par l’équipe présidentielle dans un communiqué officiel. D’autres estiment que Yoon Suk Yeol ne réagit pas aux allégations d’espionnage parce que « des questions plus importantes sont en jeu ».
Quelles conséquences pour le prochain sommet entre la Corée du Sud et les États-Unis ?
En effet, Yoon Suk Yeol se rendra à Washington ce 26 avril pour rencontrer le président Joe Biden à l’occasion des 70 ans de l’alliance Corée-États-Unis. Cette première visite d’État d’un président sud-coréen en 12 ans sera l’occasion de renforcer cette alliance en matière d’économie, de technologie… et de sécurité.
L’administration Biden cherche à minimiser l’impact que la fuite des documents pourrait avoir sur cette prochaine visite. Néanmoins, « le dernier incident sur les documents pourrait finir par renforcer l’alliance Corée-États-Unis et favoriser la Corée du Sud », selon des experts à l’Institut coréen des affaires militaires de Corée du Sud.
D’un autre côté, on peut se demander si le président sud-coréen, en ne critiquant pas le gouvernement américain, cherche à « se faire pardonner » le scandale du micro…
Sources : The Diplomat | Le Monde | The Washington Post (1)(2)
Source image : Postimees