Les récentes mesures de la ville de Mungyeong, dans la province Gyeongsang du Nord, sont dénoncées par divers groupes de défense des droits des femmes, car elles incitent au mariage international entre des agriculteurs coréens et des étudiantes vietnamiennes présentes en Corée.
Le mariage international pour pallier la chute de la natalité
La Corée du Sud fait face à des taux de mariage et de natalité décroissants depuis plusieurs années. Dans cette perspective, l’administration de la ville de Mungyeong a décidé de mettre en place une campagne qui aide les agriculteurs « plus âgés » à épouser des étudiantes vietnamiennes, afin de ralentir le déclin et le vieillissement de la population sud-coréenne.
Mais le centre des droits humains des femmes migrantes de Corée a déclaré le 28 mai 2021 qu’une telle campagne était raciste et discriminatoire vis-à-vis des immigrantes et des étudiantes internationales en Corée. En outre, selon l’association, l’administration de Mungyeong aurait demandé à des courtiers étrangers de coopérer à la mise en place de ces mariages, alors que la commercialisation du mariage international est censée être interdite en Corée.
Selon une étudiante vietnamienne présente à une conférence de presse tenue devant la Commission Nationale des droits de l’Homme de Corée, les mesures de ce genre seraient les conséquences des stéréotypes négatifs et des préjugés qu’ont les Sud-coréens des femmes vietnamiennes qui « ne viendraient en Corée que pour épouser un Coréen ».
Le centre des droits humains des femmes migrantes de Corée a donc déposé une pétition auprès de la Commission contre l’administration locale. En deux jours, 64 groupes civiques auraient signé la pétition.

Le problème des mariages coréano-vietnamiens
Si cette campagne semble être discriminatoire, le centre des droits humains des femmes migrantes de Corée omet de mentionner l’une des conséquences majeures de ce type de mariage, qui fait pourtant débat depuis de nombreuses années en Corée : le problème des violences domestiques contre les épouses étrangères, et tout particulièrement les Vietnamiennes.
Comme le rapporte CNN en 2018, des milliers de Vietnamiennes épousent des Sud-coréens par l’intermédiaire de courtiers. Mais nombre d’entre elles, après avoir émigré en Corée, sont victimes de discrimination et de violences domestiques. Les chiffres montent à 42 % pour les épouses étrangères d’après la Commission des droits de l’Homme, contre 29 % pour les épouses sud-coréennes selon le ministère sud-coréen de l’égalité des genres et de la famille. Certaines épouses étrangères finissent même par être tuées des mains de leur époux : en 2019, une Vietnamienne a été assassinée au couteau par son mari coréen, qui a été condamné à 15 ans de prison.
Il faut savoir que ces mariages internationaux se sont démocratisés dans les années 1980, alors que les jeunes femmes sud-coréennes partaient en ville afin de trouver des emplois, tandis que les hommes restaient à la campagne afin d’entretenir les terres familiales. Les administrations locales ont donc commencé à recourir aux courtiers en Chine. Au fur-et-à-mesure des années, ces courtiers ont commencé à faire venir des femmes des Philippines, du Cambodge et du Vietnam.
Afin d’empêcher ces dérives, le Cambodge a dû temporairement interdire les mariages avec des Sud-coréens en 2010 et les autorités vietnamiennes se sont longuement entretenues avec leurs homologues coréennes. De son côté, la Corée du Sud a restreint l’obtention de visa aux hommes qui n’avaient commis aucun acte abusif par le passé et qui étaient capables de communiquer avec leurs épouses. Mais on peut se demander si cela est suffisant, notamment au vu des nouveaux cas qui défraient régulièrement la chronique en Corée et de la campagne menée par la ville de Mungyeong.
Sources : The Korea Times | Women Migrants Human Rights Center of Korea | CNN | The Diplomat
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