Lauréat du Prix de la Mise en scène à Cannes en juin 2022, Decision to Leave de Park Chan Wook s’affirme comme un thriller romantique prenant et intense.
Présentation de Decision to Leave
À l’affiche des salles françaises depuis le 29 juin 2022, Decision to Leave a suscité des critiques plutôt dithyrambiques. Précis dans la forme, le fond n’est néanmoins pas toujours convaincant. Retour sur un grand film – pas le meilleur pourtant – du célèbre Park Chan Wook.
Synopsis de Decision to Leave
Hae Joon se dédie corps et âme à son travail de détective. Alors qu’il est préposé aux crimes violents, sa hiérarchie lui confie l’enquête de la mort suspecte d’un homme, survenue au sommet d’une montagne. Suicide ou meurtre ? Hae Joon soupçonne bientôt la femme du défunt, une Chinoise immigrée. Bientôt pourtant, son attirance pour elle semble prendre le pas sur sa rigueur habituelle.
Bande-annonce sous-titrée en français
Decision to Leave, retour sur l’équipe du film
Le scénario est co-écrit par Park Chan Wook et Jung Seo Kyung. Leur collaboration fait longue date : on se souvient bien sûr de Sympathy for Lady Vengeance en 2005 et de Mademoiselle en 2016. Ce dernier avait d’ailleurs déjà fait sensation à Cannes. Connu pour l’esthétique de sa mise en scène, Park Chan Wook s’est surpassé dans Decision to Leave ; son prix reçu à Cannes est amplement mérité.
Côté casting et personnages, Park Hae Gil livre une performance incroyable proche de la perfection dans le rôle du détective déstabilisé dans son éthique et ses principes. J’ai été moins transportée par Tang Wei et son personnage. Alors qu’elle incarne une femme pleine de faux-semblants, son jeu ne m’a pas toujours semblé à la hauteur. Mais cela reste limité à quelques scènes et d’autres séquences plus qu’époustouflantes nous les font aisément oublier.

Park Hae Gil et Tang Wei entourant Park Chan Wook sur les marches de Cannes en mai 2022
Aimer et partir : construction d’une dynamique singulière
Decision to Leave se dévoile en deux parties assez distinctes construites en écho aux sentiments des personnages. L’obsession passe de l’un à l’autre, le monde ne semble ne tourner plus qu’autour d’eux. Attention, spoilers.
Aimer, mais partir
La première partie se focalise sur l’enquête de la mort suspecte de l’homme. Randonneur et alpiniste chevronné, la thèse de l’accident ou du suicide paraît douteuse dès le début. D’autant que les éléments s’accumulent pour dire qu’il était loin d’être un bon mari. Sa femme So-Rae devient la principale suspecte et le détective passe ses jours et ses nuits à la surveiller. À travers cette observation, il noue un lien singulier avec la suspecte. Celle-ci l’intrigue. Un jeu de faux-semblants s’installe doucement… Hae Joon résiste difficilement au magnétisme de So-Rae, l’envoûtement opère. Jusqu’à ce qu’il découvre la vérité. Épris d’elle, il la quitte pourtant. La scène de séparation des deux protagonistes est à mon sens une des plus fortes, avec celle de la fin. Brisé dans ses principes et déçu de lui-même, Hae Joon protège la femme qu’il aime, mais s’en va.

À l’image de la mise en scène du film, la composition de l’affiche est complexe et dense. Chaque détail compte et invite à la contemplation.
Aimer puis partir
C’est à partir de cette scène que s’ouvre la deuxième partie du long métrage. Une ellipse temporelle nous transporte près d’un an plus tard. Hae Joon a rejoint sa femme et enquête désormais dans une petite ville sans histoire. Pourtant, un nouveau crime le remet sur la piste de So-Rae. Très vite, il apparaît que l’amour et l’obsession sont passés de l’autre côté. Alors qu’elle le manipulait au début, notre femme fatale cherche désormais à attirer l’attention de son amour déchu. Ce dernier se fait une résolution : cette fois, il ne flanchera pas. Tout cela ne peut se terminer que d’une seule façon. La dernière séquence est simplement sublime. Le deuxième paroxysme est atteint : la mer monte, elle sombre, il court, la nuit tombe, il court toujours.
Mon sentiment sur Decision to Leave
Complexe et dense, Decision to Leave mérite, à mon sens, d’être vu plusieurs fois. Chaque visionnage ajoutera quelque chose de nouveau pour comprendre l’ampleur du travail de Park Chan Wook et l’appréhender à sa juste valeur, pour voir des subtilités et des détails qu’on ne remarque pas forcément tout de suite et qui participent à l’élaboration de l’ambiance de ce thriller romantique où le temps est comme suspendu.