Kim Nyung Man est un photographe reconnu de Corée du Sud. Il a participé à de nombreux événements historiques durant sa carrière. De ses photos se dégagent à la fois des moments de solennité et d’une grande humanité. Vous ne connaissez pas encore son travail et ce qui l’a amené à la photographie ? Découvrons cela ensemble !
La découverte de la photographie au service de l’Histoire
Kim Nyung Man est né en 1949, à Gochang (région de Jeolla du Nord). Dans ce district, des ruines de remparts restaient sans date d’édification connue. En 1969, le Conseil général offrit une récompense à la personne qui parviendrait à les dater par le biais d’un concours. Kim Nyung Man se rendit sur le site et photographia les inscriptions. Avec l’aide d’ouvrages sur l’époque de Joseon et de ses clichés, il put établir que les murailles dataient de 1453 lors du règne de Danjong (1441 – 1457), sixième roi de Joseon.
« Je n’aurais pas eu à me donner tant de mal si les livres parlant de la construction des murs avaient cité cette date à un endroit ou à un autre. C’est à ce moment-là que j’ai compris à quel point les archives sont importantes. De plus, j’ai été séduit par la photographie en m’en servant pour vérifier les résultats de mes recherches. Alors avec l’argent du prix, je suis parti étudier la photographie à Séoul. »
Source : Koreana – été 2014
Après ses études, il retourna dans sa région et prit en photo les transformations opérées dans les campagnes coréennes par le Saemaeul Undong (새마을운동). Nommé également Mouvement de la nouvelle communauté ou du nouveau village, il a été lancé par Park Chung Hee en avril 1970 afin de moderniser l’économie du pays. Très rurale, la Corée du Sud subissait une grande disparité entre les villes devenant industrielles et les villages devenant de plus en plus pauvres. C’est à cette époque que le réalisme prédomine dans la photographie coréenne : le peuple est le principal sujet, montrant les conditions de vie modestes des Coréens.
Puis, Kim Nyung Man se forma une nouvelle fois à la photographie à l’université Chung Ang. Il fut diplômé en 1978 et engagé par la suite au Dong A Ilbo en tant que photographe-reporter.
La riche carrière photographique de Kim Nyung Man
Son travail de photographe-reporter
Le Dong A Ilbo (« Quotidien d’Asie orientale ») fait partie des journaux principaux publiés en Corée du Sud. Kim Nyung Man y travailla pendant 23 ans, jusqu’en 2001. Mais, parmi ses nombreux clichés, un seul a été choisi par le rédacteur en chef pour être publié. Pendant cette période, il a couvert les événements de Cheong Wa Dae (le bureau présidentiel ou Maison bleue), le village de la trêve de Panmunjeom, ainsi que les manifestations pour la démocratisation de la Corée du Sud.
Concernant le soulèvement de Gwangju, ses photographies ont été censurées, car elles montraient les soldats menaçant les étudiants qui manifestaient pour la démocratie ; ce qui n’a pas plu au gouvernement de Chun Doo Hwan. La publication de ces clichés ne se fit qu’en 1993 dans un livre de photos.
Protestation à Gwangju, 1989 © Kim Nyung Man
Kim Nyung Man a aussi publié cinq autres livres de photographies et une collection d’essais. En 2003, il reçoit la récompense culturelle de la ville de Séoul et en 2005, le prix du photographe étranger du festival de photographie de Higashikawa (Hokkaido, au Japon). Avec les photos prises au cours de sa carrière au Dong A Ilbo, il sortit plusieurs séries thématiques, dont « Qu’est-ce que la présidence ? » et « 20 années de soulèvements. » En 2014, il publie le recueil « Portrait des temps », présentant la Corée du Sud sur quarante années avec 270 photographies.
Des photos pour se remémorer
« Je traite les photos comme des souvenirs et non des enregistrements. Je veux que mes œuvres aient de l’humour et rendent les gens heureux, comme en buvant du makgeolli. »
Source : Korea Joong Ang Daily [Traduction anglais > français : K.Owls]
Outre le côté historique, j’ai été attirée par l’humanité de ses photographies. En parcourant son œuvre, je me suis surprise à sourire devant la tendresse, l’humour et l’espoir qui s’en dégagent. Kim Nyung Man fut témoin de grands moments de l’Histoire de son pays, mais son talent artistique réside dans la capture d’instants brefs. Ceux que l’on montre moins afin de préserver la gravité de la situation. Ses clichés expriment son regard bienveillant.
Panmunjeom, Nord et Sud main dans la main, 1992 © Kim Nyung Man
Depuis sa retraite, il apprécie toujours autant de photographier sa région natale et les lieux emblématiques de Panmunjeom et de la DMZ (la zone démilitarisée près de la frontière avec la Corée du Nord). Kim Nyung Man trouve important de continuer à photographier la division coréenne et d’exposer les souffrances qui en découlent.
« Je crois que les deux pays seront unis un jour. Et, pour le restant de ma vie, je veux prendre de nombreuses photos des villages proches de la zone frontalière où de nombreuses personnes ont encore des blessures venant de la division, pour que la future génération apprenne qu’une telle chose ne doit plus se produire. »
Source : Korea Herald [Traduction anglais > français : K.Owls]
Panmunjeom, 1995 © Kim Nyung Man