Squid Game est sans aucun doute la série sud-coréenne la plus populaire de l’année 2021 : on ne compte plus le nombre de fans qui s’habillent comme les personnages de la série et qui s’amusent à tailler des biscuits Dalgona sur les réseaux sociaux ou lors d’événements. Intrigué par son succès, le philosophe Olivier Dhilly a décidé d’analyser ce phénomène dans La philosophie selon Squid Game.
Résumé de La philosophie selon Squid Game
Olivier Dhilly est un conférencier et professeur agrégé de philosophie au Lycée d’État de la Légion d’honneur de Saint-Denis et à l’Institut d’Études Judiciaires Paris II-Sorbonne. Créateur du premier site internet d’aide en ligne dédié à la philosophie au début des années 2000, il dirige aujourd’hui la collection Les philosopheurs aux éditions l’Opportun et est l’auteur de plusieurs ouvrages, dont La philosophie selon Squid Game.
« Nous vivons dans le monde Squid Game » rappelle son réalisateur Hwang Dong Hyeok. C’est sur ce postulat qu’Olivier Dhilly s’appuie pour analyser l’univers ultra-violent et de servitude volontaire de la série. Il s’interroge ainsi sur la valeur de l’existence humaine et sur la démocratie, mais aussi sur des valeurs telles que la justice ou le travail. Il revient également sur les liens entre l’individualisme et la vie en collectivité, tout en se référant à des grands noms de la philosophie comme Rousseau ou Arendt pour n’en citer que quelques-uns.
Mon avis sur La philosophie selon Squid Game
Une lecture très agréable
La lecture de cet ouvrage est très aisée. Les phrases sont courtes, comportent peu de termes « poussés » et les idées sont organisées de manière claire grâce aux sous-titres et aux paragraphes. Ces sous-titres prennent parfois la forme de questions, qui invitent le lecteur à réfléchir sur certaines notions, avant que l’auteur n’exprime son opinion dessus (je me suis d’ailleurs surprise à plusieurs reprises de ma position quant à certains sujets).
Des notes de bas de page et des encadrés sont également présents sur tout le livre et permettent aux lecteurs, s’ils le veulent, d’approfondir leur connaissance des concepts et philosophes mentionnés. Par contre, je note un petit défaut de l’édition, qui ne propose pas de bibliographie à la fin et ne mentionne pas les autres ouvrages de la collection qui pourraient porter sur des thèmes similaires et intéresser le lecteur.
La philosophie accessible à tous
Un des points forts de ce livre, certes attendu mais que je préfère confirmer, est qu’il est accessible à tous, qu’on ait déjà des notions de philosophie ou non. Mes derniers cours de philosophie remontent à il y a quatre ans et bien que j’en garde un mauvais souvenir, cela ne m’a pas empêchée d’apprécier ce livre, qui n’a pas la lourdeur des cours académiques.
Au contraire, Olivier Dhilly utilise des exemples issus de la série pour illustrer des notions simples qui font partie de notre quotidien et que nous connaissons tous, ou que nous croyons connaître. En se référant à des passages de la série, mais aussi à des domaines comme l’économie ou la sociologie, Olivier Dhilly nous montre à quel point les débats philosophiques sont omniprésents dans notre société.
Une lecture indépendante de la série
Je tiens à préciser que je n’ai pas vu la série Squid Game. N’étant pas à l’aise avec les séries « violentes », je n’ai pas été attirée de suite par la série. Néanmoins, l’engouement autour de Squid Game m’a donné envie de m’y intéresser et j’ai donc profité du fait qu’Olivier Dhilly vienne présenter son ouvrage au centre culturel coréen de Bruxelles pour me plonger dans son univers, par la lecture.
Je peux donc vous assurer qu’il n’y a aucune obligation à voir la série pour comprendre les propos de La philosophie selon Squid Game. Les moments utilisés pour illustrer des notions sont remis en contexte pour que le lecteur puisse se remettre le passage en tête et ne gâchent en aucun cas les moments clés de la série, ni sa fin. Il est donc tout à fait possible de lire ce livre avant de regarder la série, tout comme de faire l’inverse, ou même de ne pas du tout voir la série. Dans tous les cas, la lecture de La philosophie selon Squid Game apportera des clefs au lecteur, lui permettant de voir les parallèles entre la série et la « vraie vie ».
Une réflexion sur la société française ?
Pour expliquer les notions philosophiques abordées grâce à Squid Game, Olivier Dhilly n’hésite pas à faire le lien avec des questions sociétales françaises telles que l’avortement ou le suicide assisté. Je trouve très intéressant que ce livre amène le lecteur à se questionner sur des sujets d’actualité, qui n’ont au premier abord aucun lien avec Squid Game (même si j’admets que l’anecdote sur le cannibalisme m’a fait froid dans le dos…).
Et la société coréenne ?
Cet aspect m’amène au principal reproche que je pourrais faire à cet ouvrage, qui ne remet pas réellement en cause sa qualité dans la mesure où il est dû à une attente personnelle. En effet, en tant que passionnée par la Corée, je m’attendais à ce que l’auteur fasse de nombreux parallèles entre la série et la société sud-coréenne contemporaine, d’autant plus qu’Olivier Dhilly avait déclaré en présentant son ouvrage que, selon lui, le réalisateur de la série s’était inspiré de son environnement. Mais s’il y a effectivement quelques références en début d’ouvrage, celles-ci sont peu nombreuses.
Par exemple, Olivier Dhilly aborde à un moment le développement économique du Chili, qui a été permis par une combinaison de liberté économique et de dictature politique. La plupart des personnes s’intéressant à la Corée feraient alors immédiatement le lien avec le miracle économique coréen, qui s’est produit sous le régime autoritaire de Park Chung Hee. Alors qu’il aurait été davantage pertinent de lier Squid Game à ce moment important de l’histoire sud-coréenne, l’auteur n’en fait aucune mention.
Mais il serait malgré tout injuste d’en tenir compte dans l’appréciation du livre étant donné qu’Olivier Dhilly n’est en aucun cas un spécialiste de la Corée.
Conclusion
Même si je n’en ai pas appris autant que je l’aurais voulu sur la société coréenne, les réflexions apportées dans La philosophie selon Squid Game ont rendu cette lecture très instructive. Je ne peux donc que recommander cette lecture rapide aux Owlers (à peine 128 pages) ! Elle nous rappelle, comme le diraient certains internautes, qu’on « vit dans une société » dans laquelle l’individu et la collectivité sont interconnectés et qu’il ne tient qu’à nous, qui vivons en son sein, de décider ce qu’elle peut devenir.
Où trouver La philosophie selon Squid Game ?
Olivier Dhilly, La philosophie selon Squid Game, Les Editions de l’Opportun, août 2022, ISBN : 2380155003. Format broché à 12,90 € et format ebook à 7,99 €.
Source photographie : Editions de l’Opportun