Du 5 au 17 septembre a eu lieu l’édition 2023 de l’Étrange Festival, lors de laquelle cinq films sud-coréens ont été projetés. Le hibou Liz a pu s’y rendre et vous partage son expérience ainsi que son avis sur les films qu’elle a pu voir.
Retour sur l’édition 2023 de L’Étrange Festival
Présentation de l’événement
Créé en 1993, L’Étrange Festival prend place tous les ans au début du mois de septembre, au Forum des images (Paris). Son but est d’offrir la possibilité de voir des films rares voire inédits au public parisien, d’où la présence régulière de films en avant-premières françaises, européennes et même internationales. Le festival accueille des films de tous les genres, allant du fantastique au documentaire, en passant par le drame, l’horreur et le conte.
Tous les ans, des invités prestigieux du monde du cinéma interviennent au festival, tels que Charlotte Rampling ou Gaspar Noé pour ne citer qu’eux, et y délivrent des prix. À savoir que Canal+, partenaire officiel du festival, y dédie également un grand prix.
N’ayant découvert L’Étrange Festival que sur le tard dans un podcast, l’édition 2023 était la première à laquelle je me suis rendue, alors qu’il s’agissait déjà de la 29e édition ! Même si le Forum des images est un lieu beaucoup plus petit et calme que le Brussels Expo où se tenait le BIFFF il y a quelques mois, l’ambiance à l’accueil y était tout aussi chaleureuse et le public en salle tout aussi réceptif aux films proposés.
Les films sud-coréens à L’Étrange Festival 2023
Les films que j’ai pu voir étaient tous projetés dans la salle 500, une salle de 444 places à l’acoustique très qualitative (j’avais l’impression de recevoir les coups de matraque dans la tête en même temps que les personnages !). La disposition des sièges dans la salle rend également la lecture des sous-titres très pratique, peu importe l’endroit où l’on se situe par rapport à l’écran.
Avant chaque projection, un des organisateurs du festival venait présenter le contexte de création et le background des personnages du film proposé. Malgré quelques petites erreurs (on ne peut pas leur en vouloir de se mélanger les pinceaux de temps en temps), ces rapides introductions étaient très intéressantes et m’ont permis d’aborder les films sous un autre angle.
Parmi les films projetés cette année, cinq films sud-coréens : The Childe de Park Hoon Jung (en première européenne), Concrete Utopia de Um Tae Hwa (en première européenne), On the line de Kim Gok et Kim Sun, Don’t buy the seller de Park Hee Kon (en première internationale) et The roundup: no way out de Lee Sang Yong (en première française). Si je n’ai pas eu la possibilité de regarder Concrete Utopia, j’ai pu assister aux projections des quatre autres films.
Mon avis sur la sélection coréenne de L’Étrange Festival 2023
The Childe de Park Hoon Jung (귀공자, 2023)
Résumé : The Childe suit Marco, un boxeur konipo (moitié coréen et moitié philippin) qui veut retrouver son père en Corée afin de sauver sa mère. Mais arrivé dans le pays, il est traqué sans relâche par des individus dangereux, dont un certain Nobleman…
Mon avis : J’ai assisté à la deuxième projection de The Childe et j’ai été étonnée du peu de fans de hallyu présents dans la salle. Le film est assez violent (je pense à une tête coupée dans la scène introduisant le Nobleman), mais l’humour (présent de manière parfois inattendue) compense largement cet aspect.
Bien que l’on suive au départ le sympathique boxeur Marco, je trouve que le Nobleman interprété par Kim Seon Ho (les hiboux vous avaient d’ailleurs parlé du fait que ce film marquait ses débuts au cinéma) est beaucoup plus intéressant : il s’agit d’un psychopathe aux tics hilarants, d’un véritable maniaque en termes de style vestimentaire, à l’accent anglais typiquement coréen et au sourire pouvant autant faire rire que peur. Mais cela est certainement voulu de la part du réalisateur : lorsque le film s’accélère en dernière partie, la caméra s’attarde beaucoup plus sur le Nobleman. Si Marco est le personnage auquel on peut s’identifier car il se retrouve dans une situation qui le dépasse, le véritable héros du film est sans aucun doute le Nobleman, qui fait l’action au lieu d’en être la victime. J’ai été époustouflée par le jeu de son interprète, Kim Seon Ho (Hometown Cha-Cha-Cha), que je ne connaissais pas avant de voir The Childe. Et je pense que vous l’aurez déjà compris, mais je suis devenue fan !
Pour revenir sur le scénario, les facilités typiques de ce genre de films d’action coréens ne m’ont pas dérangée, même si j’ai trouvé léger le fait que les personnages s’en sortent sans conséquences et que le père n’utilise pas son temps avec son fils de manière plus intelligente (désolée d’être aussi floue, mais je ne veux pas vous spoiler). Si je devais trouver un véritable défaut à ce film, il s’agit du sort du personnage du Nobleman, qui n’est en réalité pas ce qu’il semble être au départ. Cela en est presque dommage, car le film et le personnage auraient pu être beaucoup plus intéressants sans ce retournement de situation.
On the line de Kim Gok et Kim Sun (보이스, 2021)
Résumé : Dans On the line, l’ancien détective Han Seo Jun cherche à venger sa femme et son chef de chantier, tous les deux victimes d’hameçonnage par téléphone, en traquant en Chine l’organisation criminelle à l’origine des appels.
Mon avis : J’ai trouvé On the line réellement sympathique : le film est entraînant et le fait que le méchant soit une parodie (assumée ou pas, consciente ou pas) de Steve Jobs est très amusant. J’ai aussi beaucoup aimé le fait que les victimes du démarchage téléphonique ne soient pas caractérisées comme « idiotes », mais méfiantes et censées, montrant l’ingéniosité des arnaqueurs et le fait que tout le monde puisse en être victime. Il y a certes quelques faux raccords et clichés, mais qui ne gênent en rien l’appréciation du film et qui sont plus que pardonnables étant donné qu’il s’agit de la première réalisation d’une telle ampleur pour Kim Gok et Kim Sun. Néanmoins, j’aurais aimé un peu plus de rebondissements ou de surprises (un personnage trahit certes le héros, mais cela arrive à la fin et n’a aucune répercussion).
J’ajouterai que ce film a le mérite de s’attarder sur un sujet de société : celui des arnaques par téléphone. Je n’avais encore jamais vu ce sujet abordé au cinéma, ce qui est étonnant étant donné son ampleur et la dépendance des personnes aux téléphones portables, que cela soit en Corée ou dans le reste du monde. On pourrait également dire que ce film critique la bureaucratie et la lenteur des institutions (pourquoi la police attend-elle que Han Seo Jun aille en Chine pour qu’elle décide de démanteler le gang, alors qu’elle semble déjà avoir à disposition tout ce dont elle a besoin pour le faire ?).
Don’t buy the seller de Park Hee Kon (타겟, 2023)
Résumé : Après avoir acheté une machine à laver qui ne fonctionne pas sur une application, Su Hyeon accuse le vendeur d’escroquerie et le signale à la police. Mais le vendeur est en réalité un tueur en série psychopathe et Su Hyeon devient sa cible…
Mon avis : Pour être honnête, je ne m’attendais pas à autant apprécier Don’t buy the seller. Je pensais qu’il se rapprocherait davantage du film d’horreur. Mais bien qu’il y ait quelques scènes d’inspiration horrifique (dont un screamer qui fonctionne même si on le voit venir), il s’agit avant tout d’un thriller « à la coréenne ».
Dans la lignée du film présenté précédemment, Don’t buy the seller aborde le sujet des arnaques par téléphone tout en critiquant le capitalisme et la lenteur des procédures administratives au sein de la police sud-coréenne. Si l’héroïne essaie de se venger de son arnaqueur tout comme le protagoniste de On the line, cela se retourne ici contre elle. Le fait que Don’t buy the seller soit beaucoup plus réaliste, dans un environnement citadin et quotidien qui nous est familier, nous aide sans doute à nous attacher à Su Hyeon et à craindre pour sa sûreté.
Il est d’ailleurs agréable de suivre une héroïne intelligente, qui ne se laisse pas avoir (à un moment, les spectateurs étaient persuadés qu’elle allait faire une bêtise en effectuant un virement et se sont exclamés, mais elle s’est ressaisie au dernier moment, à notre plus grand soulagement). L’humour du film, surtout en première partie, est également très bon (je pense à une scène au commissariat, lorsqu’un pervers affronte le regard noir de l’officier de police). Le film passe de l’humour à l’angoisse en quelques secondes, et cela fonctionne si l’on se fie aux réactions de la salle. Pour moi, Don’t buy the seller n’a pas beaucoup de défauts, si ce n’est deux scènes d’action en fin de film difficiles à suivre, et qu’il est facile de deviner l’identité du psychopathe.
The roundup: no way out de Lee Sang Yong (범죄도시3, 2023)
Résumé : Après les événements de The Roundup, l’inspecteur Ma Seok Do rejoint l’équipe d’enquête métropolitaine afin d’éradiquer les gangsters japonais qui pénètrent en Corée par l’intermédiaire d’agents coréens pour y commettre des crimes odieux, dont du trafic de drogue.
Mon avis : The roundup: no way out est le dernier film que j’ai vu dans le cadre de L’Étrange Festival. Le film est très bon, plein d’action et d’humour, comme son prequel que j’avais pu voir lors du BIFFF à Bruxelles. Là réside à la fois sa qualité et son défaut : sa qualité car il plaira à tous ceux qui auront apprécié The roundup, et son défaut car ceux qui auront déjà vu The roundup n’auront (presque) aucune surprise, puisqu’on y retrouve la dynamique de l’équipe de Ma Seok Do et ses comiques de situation, ainsi qu’une scène d’ouverture très drôle, qui nous présente de manière efficace Ma Seok Do arrêtant des truands alors qu’il n’en a pas l’intention.
Par contre, si The roundup mettait en scène des mafias vietnamiennes, ce sont cette fois-ci les yakuzas du Japon qui sont à l’honneur ! Il semblerait qu’en Corée, le danger ne vienne que de l’extérieur… Mais au moins, cela nous permet de retrouver à l’écran l’acteur japonais Munetaka Aoki, ce qui fera plaisir aux fans de la série de films Rurouni Kenshin. C’est donc un très bon film d’action bourré d’humour, que je vous recommande vivement de voir avant la sortie de sa suite, même si j’espère que celle-ci bénéficiera d’un casting féminin plus conséquent.
Remerciements
J’ai passé une superbe semaine à l’Étrange Festival et j’aimerais donc remercier ses organisateurs de m’avoir permis de voir ces films, ainsi que les producteurs pour avoir rendu possible leur projection en exclusivité durant le festival !
Source : site de l’Étrange Festival