Diffusé en avant-première au dernier festival international du film de Busan, Yonder questionne ses personnages et son public sur la vie, la mort et le concept d’éternité.
Chers Owlers, l’article qui suit traite de sujets (euthanasie, mortalité, suicide) qui peuvent potentiellement heurter votre sensibilité. La lecture est à votre discrétion.
Avec l’avènement des plateformes de streaming, l’industrie audiovisuelle coréenne change, s’adapte, évolue. La plateforme TVING, surtout, qui semble être pour l’instant leader dans le domaine, aime proposer un contenu varié entre l’accès aux dramas dès leur diffusion télévisuelle et les histoires originales proposées. Au mois d’octobre dernier, elle s’est d’ailleurs essayée à un nouveau format de séries courtes avec des titres comme Bargain ou, le sujet de la présente critique, Yonder.
Que nous réserve la mort ? Existe-t-il un après ? Une vie après la mort ? Quel sens, alors, donner à la vie face à notre mortalité ? Si de nombreuses religions abordent le sujet sous divers concepts, Yonder propose ici une exploration plus scientifique de la question qui nous taraude tant, à un moment ou un autre.
Bienvenue à Yonder
Informations
- Titre original : 욘더
- Titre anglais : Yonder
- Genres : Drame, anticipation
- Pays : Corée du Sud
- Réalisation : Lee Joon Ik
- Scénario : Kim Jung Hoon & Oh Seung Hyeon
- Diffusion : 6 octobre 2022 au BIFF | du 14 au 21 octobre 2022 sur TVING
- Episodes : 6 épisodes
- Durée des épisodes : 35 minutes
- Plateforme : Prime Video
Synopsis
En 2032, en Corée du Sud, le gouvernement vient de promulguer une loi légalisant l’euthanasie. Cha Yi Hoo, en phase terminale d’une forme de cancer très rare, demande à abréger ses souffrances. Son mari, Kim Jae Hyun, ne peut qu’accepter et tente de se préparer au chagrin de la perdre. Le temps passe mais Jae Hyun n’arrive pas à aller de l’avant et à tourner la page jusqu’au jour où il reçoit un courriel vidéo. Quelle n’est pas sa surprise quand il voit Ji Hoo sur l’écran lui annoncer qu’elle est « encore là » et de la rejoindre à Yonder, un endroit dont il ne connaît rien.
Complètement désemparé, Jae Hyun ne veut tout simplement pas croire aux vidéos qu’il reçoit. Toutefois, sa curiosité de journaliste scientifique, ainsi que sa peine encore lourde, le poussent à découvrir Yonder, un étrange monde à mi-chemin entre celui des vivants et des morts, l’œuvre de la mystérieuse entreprise By N By.
Se pourrait-il que toute cette histoire ait un rapport avec l’étrange femme, Seiren, que Yi Hoo a rencontrée peu de temps avant sa mort ? Et avec l’énigmatique Dr K, figure de proue de ce nouveau monde pour la « vie après la mort » ?
Le drama est basé sur le roman Goodbye Yonder de Kim Jang Hwan.
Distribution de Yonder
Pour la réalisation de son tout premier drama, nous retrouvons Lee Joon Ik, cinéaste coréen célèbre pour The King and the Clown (2005), The Throne (2015) ou The Book of Fish (2021). Pour l’écriture, on retrouve Kim Jeong Hoon et Oh Seung Hyeon, deux collaborateurs réguliers de Lee Joon Ik.
Dans le rôle principal vous pouvez retrouver Shin Ha Kyun (Unicorn) qui interprète Jae Hyun. Journaliste scientifique pour la revue Science M, cet homme va voir sa vie morose et triste bouleversée par un mystérieux message vidéo de sa femme, pourtant décédée, lui demandant de lui rendre visite à Yonder.
Face à lui, Han Ji Min (Our Blues), qui joue le rôle de Cha Yi Hoo, la femme de Jae Hyun. Atteinte d’un cancer, Yi Hoo s’est éteinte à l’aide de la nouvelle loi sur la mort médicalement assistée. Peu avant sa mort, elle a signé un contrat mystérieux qui serait lié à ce fameux Yonder dans lequel Jae Hyun doit se rendre pour la revoir.
Le casting s’agrémente également d’acteurs et actrices expérimentés bien connus des dramavores comme Lee Jung Eun (Juvenile Justice) qui interprète le rôle mystérieux de Seiren, la représentante principale de l’entreprise By N By, en charge du projet Yonder, ainsi que Jung Jin Young (May It Please the Court) qui interprète le mystérieux Docteur K, qui semble être à l’origine de Yonder, ou encore Cha Soon Bae (Mental Coach Jegal), un homme dont la famille, disparue quelques années plus tôt, se trouve, tout comme Yi Hoo, à Yonder.
Le reste de la distribution est composée, entre autres, de Bae Yoo Ram (Taxi Driver), dans le rôle du hackeur Park, Shin Soo Jung (Under the Queen’s Umbrella) dans le rôle de Kim Eun Hee et Yoon Yi Reh (20th Century Girl) dans le rôle de Peach.
Yonder : au-delà de la mémoire
Une proposition alléchante…
Le postulat de départ de Yonder intrigue. Qui ne s’est jamais demandé au moins une fois ce qu’il pouvait y avoir (ou non) une fois notre vie achevée ? Si le sujet peut être source d’inquiétudes, ne serait-il pas merveilleux de proposer une réponse claire, définitive et rassurante aux vivants ? Ce sont là tous les arguments du Dr K, personnage aussi énigmatique soit-il, faisant la promotion de Yonder, un monde où les êtres aimés peuvent continuer à vivre même après leur mort et où les vivants peuvent leur rendre visite. L’idée m’a interpellée, intriguée et, plus que jamais, m’a poussée à réfléchir, à me questionner. Le drama fait fourmiller les interrogations et les débats, aussi bien sur le plan intrinsèque et scénaristique, que philosophique, preuve, pour moi, que la série ne laisse pas son spectateur indifférent.
A ces questionnements, Yonder nous laisse justement le temps de la contemplation à travers une photographie léchée et une mise en scène élégante dont seul Lee Joon Ik a le secret. Aux scènes de forêts d’automne, succèdent les neiges de l’hiver avant le calme d’une maison au bord de l’eau en plein été, bien loin du Séoul de 2032, terne et morose, presque lugubre.
… À la réalité tout autre
Toutefois, Yonder peine à aller au bout de ses ambitions.
Si, à l’instar d’un David Lynch, une partie des questions sont laissées (je le crois, de manière délibérée), sans réponses afin de laisser à chaque spectateur le soin de se faire son propre avis, nombreux sont les points d’intrigue passés à la va-vite ou restant beaucoup trop vagues pour complètement rassasier ma quête de réponses. A ceci, s’ajoute que, si la montée crescendo du suspense et des attentes du spectateur est grande, la résolution s’en trouve presque trop simple(tte) à mon goût et semble presque en décalage avec le ton général de la série.
Enfin, bien que le projet se présente sous une forme épisodique et se définisse comme une série, Yonder me semble avoir bien plus à voir avec un long-métrage longuet de trois heures, qu’avec une série courte de six épisodes. Bien sûr l’équipe technique du drama, bien plus habituée au grand écran plutôt qu’au poste cathodique, n’y est pas étrangère et cette influence joue sur la construction de l’histoire : une longue exposition, une série de péripéties encore plus longue pour enfin voir l’intrigue se dénouer dans les trente dernières minutes. Le problème, selon moi, c’est qu’avec un format épisodique, le rythme en est tout de suite impacté, se fait bien plus lent, là où la plupart des dramas plus classiques offrent divers rebondissements et alternent les passages de tension et les scènes à l’atmosphère plus détendue.
Malgré une base intéressante qui donne à réfléchir et une cinématographie soignée, le format d’œuvre hybride, à mi-chemin entre le film et la série, de Yonder m’a laissée sur ma faim et empêche, pour moi, son scénario d’exploiter tout son potentiel.
Sources : Han Cinema | Asian Wiki | Soompi (1)(2)